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Bêtes du Sud sauvage (les) (2012)
de Benh Zeitlin
publié le samedi 3 janvier 2015

par Lucien Logette
Jeune Cinéma n° 346, été 2012

Sélection officielle Un certain regard au Festival de Cannes 2012. Caméra d’or 2012

Sortie le mercredi 12 décembre 2012


 


Le film arrivait lourdement chargé d’un Grand prix obtenu au dernier Festival de Sundance par Benh Zeitlin, son auteur. Allait-il être à la hauteur des récents primés dans l’Utah, Courtney Hunt pour Frozen River, Lee Daniels pour Precious, ou Debra Granik pour Winter’s Bone  ? (1) Ou n’être qu’un produit "indé" de plus, sympathique et oubliable ?
Examen de passage réussi haut la main et la Caméra d’or attribuée à Beasts est largement méritée.


 

Le film se passe dans le bayou louisianais, parmi une population lacustre de sous-prolétaires du delta du Mississippi, misérables pêcheurs de crabes ou vieillards accrochés à leurs baraques rafistolées.


 


 

Hushpuppy, 6 ans, y vit avec son père, poussant comme une plante sauvage, autonome et cabocharde. Depuis la mort de sa mère, elle vit en relations avec la Nature (avec majuscule), à l’écoute du marais, de ses mythes, des animaux fantastiques qui le hantent, un peu sorcière, telle l’institutrice vaguement chamane qui enseigne comment survivre aux quelques gosses du bayou.


 


 

Pas de tendresse dans ce microcosme. Le père l’élève à la trique et lorsqu’une fille du bordel local la prend dans ses bras, elle avoue que c’est sa première embrassade.
Pas de regard poétique non plus lancé sur un univers en déglingue - nous ne sommes pas dans Louisiana Story  -, mais une fusion totale avec le paysage et les forces qui l’habitent, même fantasmées, à l’image des aurochs qui traversent ses cauchemars et qu’elle parvient à maîtriser.


 


 

Comme dans la chanson de Bob Dylan, "It keeps on raining and the levee gonna break" : les digues submergées, les baraques balayées, la vie devient impossible dans le bayou. Adieu à l’enfance.


 

Le film est superbe, constamment inventif et la jeune Quvenzhané Wallis, l’âge du rôle, absolument renversante.
Soulevée à bout de bras par son réalisateur - à qui on souhaite un futur aussi productif que certains de ses prédécesseurs à Sundance, Todd Haynes, Todd Solondz, Bryan Singer ou Jonathan Nossiter - , elle a connu, en fin de projection, une standing ovation qui lui fera des souvenirs pour quelques décennies.

Lucien Logette
Jeune Cinéma n° 346, été 2012

1. Ces trois films, récompensés au Festival de Sundance, ont eu, par la suite des parcours remarquables dans les festivals du monde entier.
Frozen River de Courtney Hunt (2008) ; Precious de Lee Daniels (2009), sélection Un certain regard au Festival de Cannes 2009, a reçu 3 Oscars en 2010 ; Winter’s Bone de Debra Granik (2010), selectionné et récompensé à la Berlinale 2010.


Les Bêtes du Sud sauvage (Beasts of the Southern Wild). Réal : Benh Zeitlin ; sc : B.Z., Lucy Alibar. Int : Quvenzhané Wallis, Dwight Henry, Lowell Landes, Levy Easterly (USA, 2012, 92 mn).



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