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Des figues en avril (2017)
de Nadir Dendoune
publié le mercredi 4 avril 2018

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 4 avril 2018


 


Le film commence par un plan de la mère du réalisateur qui feuillette un album-photos. Elle évoque alors son voyage en Australie, là où elle avait pu manger ses fruits préférés, les figues de Barbarie, en avril, à cause du décalage saisonnier.
Ainsi commence ce portrait de Messaouda Dendoune, la mère du réalisateur, qu’il filme souvent avec son téléphone portable, par exemple lorsqu’il vient prendre le café avec elle le matin.


 

On voit cette femme magnifique de 82 ans dans son quotidien, dans son petit appartement de banlieue, où elle s’applique, malgré son âge et sa mélancolie, aux tâches ménagères, la télé qui s’invite par le biais de l’émission Les douze coups de midi, remerciée au générique. Elle se sent bien seule depuis que son mari, un peu plus âgé qu’elle, a été placé en EPHAD, parce qu’il était tombé et perdait la mémoire.


 


 

Mais Messaouda est une femme digne, qui conserve sa droiture et son intégrité. Elle lui rend visite tous les jours car, dit-elle, elle ne peut pas se passer de "son homme" et ne lui dira jamais qu’il n’est plus à la maison. Pour elle, selon ses traditions, c’est une trahison de se séparer d’un membre de la famille.


 

Ce qui est très intéressant avec ce film, réalisé à partir d’une dizaine d’heures de rushes, c’est qu’il nous présente Messaouda - "Kabyle des montagnes", comme elle aime à se définir - comme une mère universelle.
C’est la mère mythique, nourricière, celle qui nous berce et nous donne la force de vivre. Messaouda force l’admiration, elle qui fait preuve de tellement de sagesse, qui ne sait ni lire ni écrire, et regrette la dureté du monde, la précipitation avec laquelle les gens vivent de nos jours. Elle prie devant sa télé pour que les pauvres et les étudiants puissent gagner un peu d’argent dans son émission de jeux favorite.

Le plan final, lorsqu’elle est au lit devant son téléviseur qui murmure et bleuit la lumière de la scène, avec le petit ours en peluche qui protège la maison vide, renvoie aux (presque) mêmes mots de Anna Magnani dans Fellini-Roma, face au réalisateur qu’elle regarde un peu de biais et qui commence à l’agacer : "Va dormir maintenant !" Le film de Nadir Dendoune, à la triple nationalité algérienne, française et australienne, est un message d’amour très simple et puissant à la fois.


 

Ce beau documentaire donne envie de mieux comprendre sa mère et de l’aimer.
Nadir Dendoune est un hyperactif : auteur déjà de Journal de guerre d’un pacifiste, de Lettre ouverte à un fils d’immigré, Un tocard sur le toit du monde et Nos rêves de pauvres (2017), il est également alpiniste. Le 25 mai 2008, il a atteint le sommet de l’Éverest, devenant ainsi le premier Franco-Algérien à atteindre le toit du monde.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Des figues en avril. Réal, sc : Nadir Dendoune. Avec Messaouda Dendoune (France-Algérie-Australie, 2017, 57 mn). Documentaire.



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