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Cinq et la peau (1982)
de Pierre Rissient
publié le mercredi 30 mai 2018

par Anne Kieffer
Jeune Cinéma n° 144, été 1982

Sélection officielle Cannes Classic du Festival de Cannes 2018.

Sorties les mercredis 2 juin 1982 et 30 mai 2018


 


Cinq et la peau de Pierre Risssient suit l’errance à travers Manille de Ivan (Feodor Atkine).
Cette promenade solitaire s’imprègne d’odeurs, de couleurs et de bruits. Au luxe des beaux quartiers répondent l’exubérance des rues marchandes et la misère effroyable des bidonvilles.


 


 


 

Ivan, dont la ressemblance physique avec le réalisateur est étonnante, essaie de sentir, d’appréhender Manille et de s’y laisser couler. Peception nécessairement liée à la culture occidentale, qu’elle soit littéraire - Rimbaud, Cendrars, Miller et Vailland - ou cinématographique - Marker et Resnais.

Bref, il s’agit d’une mise en scène somptueuse, d’un film d’homme et de la confession troublante de sa misogynie.


 


 

Les prostituées que rencontre Ivan sont les initiatrices du plaisir raffiné. Toujours belles, toujours bien habillées, elles défilent dans sa vie comme les froids mannequins d’une revue de mode. Le vrai partenaire d’Ivan est l’ami philippin.
Ivan-Rissient s’identifie aux personnages de Raoul Walsh et de Lino Brocka. C’est son droit le plus absolu.

Cinq et la peau est fascinant par l’outrecuidance de son exhibitionnisme.

On aime cette jonglerie d’images et de sons en harmonie avec la phrase littéraire. Lucie Albertini et Guillevic, avec Rissient, ont fait un travail d’orfèvre, tout comme les photographes Alain Derobe et Daniel Vogel.
On aime la composition très recherchée de cette mise à nu.


 


 

L’intimité d’un journal secret révélée sur l’écran renforce le voyeurisme, la curiosité de l’homme. On a devant soi l’accouchement intellectualisé du plaisir masculin à travers une analyse essentiellement masculine de sensations faisant fi de celles des femmes. Les filles de Manille fascinent Rissient comme les Réunionnaises et les prostituées de tout pays émerveillaient Roger Vailland.


 

Les confessions de cet enfant du siècle sont à la fois émouvantes et irritantes.
Adhésion et défense, preuves d’une totale féminité ou d’une aliénation de dominée ?

Anne Kieffer
Jeune Cinéma n° 144, été 1982

Cinq et la peau. Réal, sc : Pierre Rissient ; sc : Lucie Albertini, Alain Archambault, Eugène Guillevic, d’après des poèmes de Fernando Pessoa ; ph : Alain Derboe, Daniel Vogel, Romeo Vitug ; mont : Marie-Josée Chauvel, Mounira M’Hirsi, Sheherazade Saadi, Bob wade ; mu : Benoît Charvet, Claude Danu. Int : Feodor Atkine, Eiko Matsuda, Gloria Diaz (France-Philippines, 1982, 95 mn).



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