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Ma fille (2018)
de Laura Bispuri
publié le mercredi 27 juin 2018

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 388-389, été 2018

Sélection de la Berlinale 2018

Sortie le mercredi 27 juin 2018


 


L’histoire se situe en Sardaigne, pays aride et sauvage. Vittoria a 10 ans, elle vit chez ses parents avec Tina, sa mère aimante. Un jour, à la ferme voisine, elle croise Angelica dont la personnalité originale et très éloignée de sa mère, la fascine. Petit à petit, bravant la distance, elle rejoint de temps en temps Angelica qui l’amuse et l’éprouve chaque fois par de nouveaux défis. Par le regard qu’elle porte aux personnages, elle guide seule le récit et passe de l’inquiétude et de la curiosité à l’attachement qu’elle ressent pour Angelica.


 

Avec une finesse rare, Laura Bispuri parvient à évoquer à la fois l’innocence d’une petite fille dans le monde adulte, ses désirs d’indépendance et d’expérience, ses émois comme sa vaillance, et d’autre part le sentiment maternel, qui atteint ici une dimension charnelle exceptionnelle. Pour Tina, être mère est un sentiment avant tout d’amour et de protection. Angelica, elle, découvre un sentiment quasi archaïque au plus profond de sa chair, sorte d’attirance animale envers cette petite fille.


 

Sur le plan esthétique, Laura Bispuri a composé une lumière très particulière qui voile légèrement les couleurs, à la manière de la tempera en peinture. Sur les visages comme sur les paysages, celle-ci atténue l’ensemble des tonalités en leur donnant une matité spéciale, légèrement floue, projetant le récit dans un monde onirique. Les cadrages sont originaux, sobres et beaux. Elle travaille avec peu, ne conservant dans les plans que le strict nécessaire. Son film est fait de scènes inscrites dans un déroulé narratif épuré et essentiel.


 

Tina et Angelica, les deux actrices-mères (Valeria Golino et Alba Rohrwacher), atteignent chacune une vérité d’interprétation, la première dans un amour maternel débordant qui frôle sans cesse la douleur de la perte, la seconde, surprise d’éprouver un tel bouleversement et qui vit une angoisse absolue. L’une est, à chaque instant, la face cachée de l’autre.

Les liens affectifs de ce trio finissent par tisser un langage fait de regards d’approbation, d’indulgence ou de coup de folie.
La question se résout à la fin par un très joli trait d’humour de Vittoria qui par un énergique "Andiamo" dirige les deux mères sur le chemin.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 388-389, été 2018

Ma fille (Figlia mia). Réal, sc : Laura Bispuri ; sc : Francesca Manieri ; ph : Vladan Radovic ; mont : Carlotta Cristiani. Int : Valeria Golino, Alba Rohrwacher, Sara Casu, Udo Kier (Italie, 2018, 97 mn).



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