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Malliarakis, Nikita (livre)
Mayo. Un peintre et le cinéma (2002)
publié le mardi 29 juillet 2014

par Alain Virmaux
Jeune Cinéma n° 275, mai 2002

Nikita Malliarakis, Mayo. Un peintre et le cinéma, Paris, éd. L’Harmattan, 2002.


 


Jeune Cinéma est mentionné dans la bibliographie finale de ce séduisant petit livre.
En janvier-février 1991 (n° 202), nous avions salué la mémoire de Mayo en l’appelant "le grand oublié". Né en 1905 d’un père grec et d’une mère bourguignonne, il s’était éteint en 1990, et sa disparition fut alors un peu éclipsée par celle, concomitante, de Michel Leiris.
Pourquoi Mayo était-il oublié, du moins des cinéphiles ? Parce qu’on ne fait pas assez de cas des costumiers dans le champ des études cinématographiques. Pourtant, à considérer Les Enfants du paradis - débuts de Mayo dans le métier -, qui peut nier que les costumes de Arletty, Jean-Louis Barrault, Pierre Brasseur, Marcel Herrand, Louis Salou aient contribué presque autant que les décors de Alexandre Trauner et les mots de Jacques Prévert à la réussite de l’ouvrage ?
Même remarque à propos de Casque d’or et des tenues de Simone Signoret, pour ne citer que deux des nombreux films auxquels Mayo travailla.

Son fils cadet, Nikita Malliarakis (le vrai patronyme de Mayo), lui a consacré, dans le cadre d’un mémoire de maîtrise et en puisant dans les archives paternelles, une étude fort sérieuse, mais pas du tout pédante ni hagiographique.
De nombreuses maquettes sont reproduites en noir et blanc, ainsi qu’un entretien liminaire avec Marcel Carné, recueilli en 1995. La démarche de l’auteur est sagement méthodique : il étudie séparément costumes d’époque et costumes modernes, vêtements masculins et toilettes féminines, mais ses commentaires sont assez aiguisés pour que l’attention du lecteur ne faiblisse pas.

On y glane maintes révélations. Mayo - beau-frère de Gilles Margaritis, apprend-on au passage - ne cessa pas de travailler avec Marcel Carné après Thérèse Raquin (1953), comme on l’avait cru : il participa plus ou moins à tous ses films ultérieurs - L’Air de Paris, Les Tricheurs, Terrain vague, Trois Chambres à Manhattan  -, sans être forcément toujours crédité au générique. Alain Resnais, en outre, fit appel à lui pour la partie française de Hiroshima mon amour (1959). Il créa aussi les costumes d’un film de Terence Fisher, The Two Faces of Dr Jekyll, 1960).

Mais il reste vrai que, dans les années 60, alors que règne la Nouvelle Vague, il se détourne progressivement du cinéma - et ce n’est sans doute pas un hasard - pour revenir à sa première et vraie vocation : la peinture.
Après tout, il n’avait basculé vers les films que par accident : parce que, sous l’Occupation, "il fallait avoir une justification de travail vis-à-vis de la police" (la phrase est de lui) et que justement Marcel Carné, sur les conseils de Jacques Prévert, lui avait demandé son concours. Si bien que le titre choisi par son fils pour ce livre - Un peintre et le cinéma - est pleinement justifié. Une rapide biographie signale au vol qu’il appartint fugitivement à l’aventure du Grand Jeu. (1)

Deux détails, enfin, nous ont paru frappants : le fait que Lacenaire-Herrand, dans Les Enfants, ait été conçu par Marcel Carné et Mayo comme un faux dandy ; " il fait cheap" (p. 26). Et puis le fait que les coiffures, dont précisément celle de Lacenaire, avec ses bouclettes, soient souvent imputables aussi au costumier (p. 48).
Est-ce vrai également pour la mémorable coiffure de Casque d’or ? Il aurait fallu demander à Simone…

Alain Virmaux
Jeune Cinéma n° 275, mai 2002

1. Alain & Odette Virmaux, Le Grand Jeu et le cinéma, anthologie, Paris, éd. Paris Expérimental, Classiques de l’Avant-Garde, 1996.


Nikita Malliarakis, Mayo. Un peintre et le cinéma, préface de Francis Ramirez, Paris, éd. L’Harmattan, coll. Champs visuels, 2002.



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