par Bernard Nave
Jeune Cinéma en ligne directe
Sortie le mercredi 10 octobre 2018
Trois initiales, celles de Ruth Bader Ginsburg, 85 ans, dont l’existence nous était totalement inconnue avant la vision du magnifique documentaire que lui ont consacré Betsy West & Julie Cohen. Leur film construit sa biographie de manière chronologique, choix qui permet de la replacer dans l’évolution historique, sociologique, politique des États-Unis.
RBG est l’une des très rares femmes à avoir forcé les portes de la Cour suprême, en 1993. C’est son inlassable combat sur le plan légal pour les droits des femmes qui lui valut cet honneur et qui ont fait d’elle une figure si importante dans le paysage des luttes féministes aux États-Unis. Fille d’une famille d’émigrés juifs de Brooklyn, elle aura toujours en tête la recommandation que sa mère, morte quand elle avait 13 ans, lui avait donnée : "Be a lady, be independent".
De son parcours, retenons quelques éléments significatifs.
Elle fait partie des neuf étudiantes inscrites à la prestigieuse Harvard Law School, auxquelles on fait bien sentir qu’elles ont pris la place de neuf garçons (il y a cinq cents admis). Elle raconte qu’il leur était interdit d’entrer dans la bibliothèque.
Ensuite, les causes qu’elle choisit de défendre se situent dans le droit fil de celles du mouvement pour les droits civiques, comme par exemple le droit de vote dans les États du Sud.
Plus tard encore, elle soutiendra une femme à qui on refuse l’inscription dans une prestigieuse école militaire de Virginie et qui sera finalement admise après examen de son cas par la Cour suprême. Le film égrène les différents recours intentés devant l’institution.
Betsy West & Julie Cohen conduisent leur film sur un rythme soutenu, n’hésitant pas à enchaîner les documents les plus divers pour dresser un portrait attachant, non dénué d’humour, de cette petite bonne femme fragile devenue une icône même auprès des jeunes générations.
Il faut voir les regards pétillants des adolescents suivant les conférences qu’elle est amenée à donner. Il faut la voir dans ses exercices en club de sport pour entretenir sa forme, parler avec gourmandise de son amour pour l’opéra. Surtout, il faut l’écouter, elle et son mari, parler de leur relation de couple pendant plus de cinquante ans.
On sort du film revigoré, un peu plus optimiste après la mascarade scandaleuse du choix de Cavanaugh par Trump et le Sénat à majorité républicaine.
On ne s’étonnera pas que Ruth Bader Ginsburg ait pris position contre Donald lors de l’élection présidentielle, malgré son devoir de réserve. De même qu’elle ne se prive pas de commenter les décisions de la Cour suprême qu’elle désapprouve.
Bernard Nave
Jeune Cinéma en ligne directe
RBG. Réal : Betsy West & Julie Cohen ; ph : Claudia Raschke ; mont : Carla Guttierez ; mu : Miriam Cutler (USA, 2018, 97 mn). Documentaire.