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Cold War (2018)
de Pawel Pawlikowski
publié le mercredi 24 octobre 2018

par Nicolas Villodre
Jeune Cinéma n°388-389, été 2018

Sélection officielle en compétition au Festival de Cannes 2018

Sortie le mercredi 24 octobre 2018


 


Le film de Pawel Pawlikowski, tourné en noir et blanc au ratio 1,37, récompensé pour sa mise en scène, est le récit d’un amour contrarié, inspiré de la vie des parents du cinéaste.


 

Situé tantôt en Pologne, tantôt, coproduction oblige, en France, au temps de la guerre froide annoncée par son titre, il ne vaut pas seulement pour l’efficience de son scénario, pour la précision de la reconstitution d’une époque révolue, pour le jeu convaincant des comédiens, à commencer par le couple vedette, mais également pour le soin extrême apporté à la musique et à la danse, arts qui constituent le sujet du film.


 


 

Deux ethnomusicologues (Tomasz Kot, Agata Kulesza), encadrés par un apparatchik du parti (Borys Szyc), collectent les chants et les musiques traditionnels des villages les plus reculés de Pologne. Le trio est chargé par les autorités de créer une troupe de chants et de danses folkloriques. La collègue et maîtresse du héros, pure et dure, soucieuse d’authenticité et respectueuse des langues minoritaires, ruthène ou lemko, voit d’un mauvais œil l’introduction dans le répertoire de thèmes comme la réforme agraire ou la paix entre les peuples, ainsi que le choix des artistes, privilégiant leur apparence slave et leur photogénie. Elle est débarquée du projet. Une blondine arriviste séduit le musicologue.


 

On doit au talentueux Marcin Masecki les beaux arrangements musicaux de la B.O., y compris ceux des morceaux de jazz cool. Les mélodies et les chants aux effets diaphoniques et dissonants ont la clarté expressive du Mystère des voix bulgares (1). Les danses sont dignes des fameux Ballets Moïsseïev, tels qu’immortalisés par le documentaire de Maïa Merkel (2).


 

On a du mal à s’expliquer les raisons psychologiques (ou autres) qui empêchent la jeune chanteuse et le musicien plus âgé, laconique et taciturne, de vivre pleinement leur amour, mais tout ce qui les unit dans les séquences musicales - sur les scènes théâtrales des pays de l’Est comme dans la boîte de jazz du Quartier latin - est convaincant, parfaitement capté par la caméra.
En outre, la fin allusive du film ne saurait laisser insensible.

Nicolas Villodre
Jeune Cinéma n°388-389, été 2018

1. L Mystère des voix bulgares est un chœur a cappella créé par Philip Koutev en 1952.

2. Perpetuum Mobile de Maïa Merkel (1967).


Cold War (Zimna wojna). Réal, sc : Pawel Pawlikowski ; sc : Janusz Glowacki, Piote Borkowski ; ph : Lukasz Zal ; mont : Jaroslaw Kaminski. Int : Joanna Kulig, Tomasz Kot, Borys Szyc, Agata Kulesza, Jeanne Balibar, Cédric Kahn (Pologne-Grande Bretagne-France, 2018, 84 mn).



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