home > Films > Hyènes (1992)
Hyènes (1992)
de Djibril Diop Mambéty
publié le mercredi 2 janvier 2019

par Lucien Logette
Jeune Cinéma en ligne directe*

Sélection officielle en compétition au Festival de Cannes 1992

Sorties les mercredis 10 février 1993 et 2 janvier 2018


 


La plus célèbre pièce de Friedrich Dürrenmatt, La Visite de la vieille dame, (1) avait déjà été tournée en 1963, par l’Allemand Bernhardt Wicki (2), Ingrid Bergman incarnant la milliardaire revenue dans son village et qui promet la prospérité aux habitants, à condition que son ancien amant, qui l’avait fait chasser du pays, soit mis à mort. L’alliance des deux thèmes, celui de la vengeance, et celui de la puissance de l’argent qui permet d’acheter les âmes, en avait fait une œuvre à la portée universelle, capable de se plier à toutes les adaptations.


 

De la Suisse originelle du dramaturge au Sénégal de Diop Mambéty, il n’y a qu’un (grand) pas, et blanche ou noire, la vengeance a partout la même saveur. Le contexte sahélien se prêtait particulièrement à la transposition. Plus encore que dans un village européen, plus ou moins nanti, la promesse de richesses accordées peut faire oublier toute dignité à une communauté affamée et dépendante, dont la cité est en faillite : la compassion et la solidarité ne sont que de peu de poids face à la perspective de remplir les réfrigérateurs que le crédit permettra d’acheter.
Et la vie d’un seul contre le confort de tous, le marché est vite conclu. Le conseil des Sages acceptera l’enjeu : l’homme sera exécuté, et un nouveau village sera construit.


 

Le contexte africain modifie quelque peu la donne initiale. Là où Dürrenmatt affichait sèchement son cynisme et sa misanthropie, Diop Mambéty retrouve l’ampleur et la force du drame antique, tirant plus nettement le film vers la théâtralité que la version allemande précédente.


 

Pourquoi "Hyènes" ?
Parce que, comme dit la rumeur, "la hyène est capable de suivre toute une saison le lion qu’elle sait malade". Linguere Ramatou, la milliardaire, aura attendu sa proie trente années.

Lucien Logette
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Friedrich Dürrenmatt, La Visite de la vieille dame (Der Besuch der alten Dame), 1955. Création le 29 janvier 1956 à la Schauspielhaus de Zürich, dans une mise en scène de Oskar Wälterlin.

2. La Rancune de Bernhardt Wicki (1963).

* Ce texte a été publié pour la première fois dans le catalogue de Cinéma en plein air à la Villette 2005 "Nous les avons tant aimés" (juillet-août 2005).


Hyènes. Réal, sc : Djibril Diop Mambéty d’après La Visite de la vieille dame de Friedrich Dürrenmatt ; ph : Matthias Kälin ; mont : Loredana Cristelli ; mu : Wasis Diop. Int : Mansour Diouf, Ami Diakhate, Djibril Diop Mambéty, Matouredia Gueye (France-Suisse-Sénégal, 1992, 110 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts