par Patrick Saffar
Jeune Cinéma n° 388-389, été 2018
Sélection officielle en compétition au Festival de Cannes 2018
Sortie les mercredi 2 janvier 2018
C’est au cours d’une exposition de photographies que la jeune Asako aperçoit Baku pour la première fois (mais y a-t-il vraiment une première fois en amour ?). Le garçon sort, la fille le suit. Il s’arrête, elle aussi, ils s’embrassent. Il n’en faut pas plus pour que Baku, beau garçon ombrageux, "entre dans la vie" de la non moins charmante Asako.
Ce qui se passe entre ces deux-là constitue sans doute le meilleur du film : le coup de foudre initial est filmé avec une incroyable douceur, juste quelques petits pétards alentour, tandis qu’un accident de moto se conclue en étreinte.
Ainsi, l’unique, l’irremplaçable va-t-il prendre sa place dans l’ordinaire de l’existence d’Asako. Jusqu’à ce qu’un jour Baku disparaisse "banalement" de la vie de la jeune fille (il prétexte aller acheter des brioches).
Nous retrouvons alors Asako deux ans plus tard : elle rencontre un autre garçon, Ryohei, qui ressemble étrangement à Baku (il est interprété par le même comédien) tout en étant doté d’une personnalité beaucoup plus prosaïque. Asako en tombe amoureuse et se met en couple avec lui.
Mais l’extraordinaire de la rencontre initiale lors de la visite au musée projette son ombre sur le quotidien des deux fiancés, à peine perturbé par un tremblement de terre lors d’une représentation d’Ibsen.
De quel étrange amour Ryohei, le "double" de Baku, est-il désiré ?
La découverte, par Asako, de l’exposition de photographies aurait-elle conditionné pour toujours sa façon d’aimer ?
Quelle est l’image (le visage) premier qui s’est imprimée en elle ?
On aura peut-être également remarqué que, juste avant de suivre Baku, Asako aura contemplé une photographie de deux petites filles, probablement jumelles. D’un garçon à l’autre, Asako aurait-elle changé, ou serait-elle restée la même ?
Tout ceci peut sembler abstrait, et le film l’est d’une certaine manière, mais grâce à quelques superbes moments et à ses deux magnétiques interprètes, le charme opère.
Patrick Saffar
Jeune Cinéma n° 388-389, été 2018
Asako I & II (Netemo Sametemo). Réal : Ryusuke Hamaguchi ; sc : Sachiko Tanaka ; mu : Tofubeats. Int : Masahiro Higashide, Erika Karata, Koji Seto, Daichi Watanabe (Japon-France, 2018, 119 mn).