Jeune Cinéma en ligne directe
Graff de Black Lines, effacé le 19 février 2019
©Marie Christian
Humeurs de Lucien Logette
20.50 : Nazarin de Luis Buñuel (1959), Classic
Un film de don Luis inédit sur le câble, c’est devenu rare - il est vrai qu’il manque encore tous ceux de sa période mexicaine peu connue des années 40 et début 50 ; tous ne sont pas bons, mais Susana (1950), La ilusion viaja en tranvia (1953) ou El rio y la muerte (1954) valent la visite. Coincé entre deux titres pas vraiment réussis - La Mort en ce jardin (1956) et La fièvre monte à El Pao (1959) - celui-ci est un petit régal, prix international à Cannes 59. Il faillit même obtenir le prix de l’Office catholique, tant cette histoire de prêtre méritant, humilié et offensé, semblait dans la ligne. Le jury s’aperçut tout de même que le propos du cinéaste était tout sauf orthodoxe et que sa démonstration de l’inanité de la religion était fort subtile. Francisco Rabal, en curé outragé, est aussi remarquable que, deux ans plus tard, dans le rôle de séducteur de nonne que lui tricota Buñuel dans Viridiana (1961).
22.20 : Le Voyage mexicain de Pierre-Paul Puljiz (2018), Classic
Inconnu. Le film ne traite pas du cinéma mexicain, mais des réalisateurs étrangers venus tourner au Mexique. Il y a de quoi faire, même si, excepté Buñuel qui y a séjourné quinze ans, les autres cinéastes, Huston ou Peckinpah, n’y ont fait que passer.
22.40 : Bruno Podalydès, l’illusionniste d’Emmanuel Barnault (2017), Club
Également inconnu. Le cinéaste nous intéresse moins que les Mexicains d’occasion, mais il faut reconnaître que depuis bientôt trente ans, les frères Podalydès, l’un devant, l’autre derrière la caméra, occupent le terrain de façon très personnelle.
22.40 : Entre deux rives de Kim Ki-duk (2016), OCS City
Un seul film de KKd sur le câble depuis cinq ans, Pieta (mais passé quatre fois). 22 titres en 20 ans, l’auteur est une horloge. Très admiré au début de ce siècle - il lui est arrivé de présenter la même année un film à Berlin, à Cannes et à Venise -, il a connu un désamour aussi fort que surprenant, car Moebius (2013) ou le film de ce soir sont aussi intéressants que Time (2006) ou Breath (2007). Certes, L’Île (2000) ou L’Arc (2005) sont des chefs-d’œuvre, mais on ne peut pas planer tout le temps sur les cîmes.
23.15 : Que viva Mexico ! de S.M. Eisenstein (?), Classic
Le point d’interrogation à la place de la date se justifie : le film de SME n’existe pas, tout ce qu’il a filmé au Mexique en 1932 a été monté par d’autres et exploité sous plusieurs titres, Tonnerre sur le Mexique, Kermesse funèbre, etc. - on en connaît au moins trois versions, toutes lacunaires. Notre hebdo de programme indique 1939 comme date de réalisation, ce qui semble improbable - à moins qu’il ne s’agisse d’une nouvelle version récemment découverte. Le seul montage répertorié de cette période est celui de Mary Seton, Time in the Sun (1940), mais qui ne dure que 55 mn, alors que celui-ci est annoncé comme durant 90. Une surprise ? De toutes façons, toutes les bribes des séquences tournées sont superbes.
00.30 : Jules César de Stuart Burge (1970), Paramount Channel
Tombant par un hasard nocturne sur ce film en pensant qu’il s’agissait de la version de Mankiewicz, nous avons pu savourer une des daubes les plus invraisemblables vues depuis longtemps. Shakespeare, c’est du solide. Ici, c’est du blindé, même les péplums semblant trempés dans l’amidon. Mais quel générique ! Charlton Heston en Marc-Antoine, Jason Robards en Brutus, John Gielgud (pour une fois mauvais) en César + quelques transfuges, Robert Vaughn, échappé de Des agents très spéciaux, Diana Rigg, tout juste sortie de Chapeau melon et bottes de cuir, et Richard Chamberlain, émergeant de Dr. Kildare. Tous jouent à côté de leurs cothurnes et les décors sont hideux. Le film ne paraît pas avoir été distribué ici. Pour une fois, on le comprend.
20.50 : Danse avec lui de Valérie Guignabodet (2006), Famiz
Seul film inédit de toute la programmation Ciné + ce soir. Si on aime Sami Frey, on est comblé. Si on aime les chevaux également. Si on aime les histoires un peu inventives et vertébrées, moins.
20.50 : Sudden Impact de Clint Eastwood (1983), TCM
Quatrième titre de la série Inspector Callahan, le seul réalisé par Eastwood, pas tout à fait le meilleur (c’est celui de Siegel), mais pas loin. Harry a pris du poids (douze ans déjà) et de la maturité, mais reste toujours aussi radical dans sa pratique.
00.50 : Le Petit Bougnat de Bernard Toublanc-Michel (1969), Famiz
Passé il y a quatre ans, au cœur de l’été, le film est surtout renommé pour son actrice principale, Isabelle Adjani, 14 ans et qui n’allait pas en rester là. Le bougnat du titre n’est pas un marchand de charbon, mais le surnom de son partenaire, Claude Amazan, ainsi baptisé à cause de la couleur de sa peau. Le film, tout simple, décrit avec justesse la vie en colonie de vacances, cette institution en voie de disparition.
20.40 : Courrier pour la Jamaïque de Lewis R. Foster (1953), Paramount Channel
On a déjà décrit notre plaisir devant les films de ce petit-maître des années 50, spécialiste des westerns et des aventures exotiques, L’Or de la Nouvelle-Guinée, Hong Kong ou Tropic Zone. C’est d’habitude Rhonda Fleming qui interprète la belle aventurière, cette fois, c’est Arlene Dahl. C’est presque pareil : Dwan les emploiera toutes les deux dans Deux rouquines dans la bagarre (1956). Du cinoche comme on n’en voit plus.
20.40 : Premier de cordée de Louis Daquin (1944), OCS Géants
Belle réédition du quatrième film de Daquin, adaptation du roman de Roger Frison-Roche (le lit-on encore ?). Éloge du courage et du don de soi, le film pouvait à la fois être considéré comme une apologie de l’esprit de résistance et une illustration de la politique pétainiste (un peu comme l’ambiguïté du Ciel est à vous de Grémillon, les meilleures intentions pouvant toujours être interprétées à contre-sens). La France n’était pas spécialiste des films de montagne (pas d’Arnold Fanck ni de Leni Riefenstahl ici), pourtant le film reste impressionnant (le tournage à Chamonix fut héroïque).
20.50 : Thunder Road de Jim Cummings (2018), Club
Pas vu le premier film de cet enfant de Sundance (Grand prix du court en 2016). Vrai film d’auteur, puisque Cummings est scénariste, réalisateur, interprète, monteur et qu’il signe la musique. Grand prix à Deauville également. La découverte du jour.
20.50 : Tora ! Tora ! Tora de Richard Fleischer, Kinji Fukasaku & Toshio Masuda (1970), Classic
L’attaque japonaise sur Pearl Harbor, non plus comme élément de l’intrigue (Tant qu’il y aura des hommes, 1953) mais comme description stratégique : pourquoi et comment le désastre, filmé selon le double point de vue des protagonistes. Eastwood a assuré les deux visions dans son diptyque sur Iwo Jima, plus raisonnablement Fleischer a laissé illustrer la vision japonaise par deux réalisateurs qui ne sont pas manchots. Remarquable.
22.40 : El Mercenario de Sergio Corbucci (1968), TCM
Encore un Corbucci inédit - mais il a suffisamment tourné pour fournir les chaînes en titres inconnus. Il utilise Franco Nero et Jack Palance (il les reprendra pour Compañeros, 1971) dans ce western mexicain, moins puissant évidemment que Le Grand Silence, mais bien agréable.
23.55 : La Vie privée d’Elizabeth d’Angleterre de Michael Curtiz (1939), France 5
La seule "vie privée" vue sur le câble est celle de Sherlock Holmes. Bonne idée de Brion de nous proposer ce film de Curtiz, célèbre bien que peu fréquent. C’est Korda qui avait lancé la mode des "Private Life", celle d’Henry VIII d’abord, de don Juan ensuite. Ici, c’est la Warner qui met le paquet : Bette Davis (magnifiquement enlaidie), Errol Flynn, Olivia de Havilland - et Vincent Price en sir Walter Raleigh -, le tout en Technicolor. Wikipedia annonce une sortie en France en 1941, on aimerait bien savoir où, aucun film américain n’ayant été projeté durant l’Occupation.
20.40 : La Bride sur le cou de Roger Vadim (1961), OCS Géants
Tous les films de Bardot des années 50 et un peu au-delà échappent à la critique. Hormis La Vérité, tous n’ont d’intérêt que d’être un véhicule pour la star, même lorsqu’elle ne l’était pas encore : Cette sacrée gamine, En effeuillant la marguerite, Une Parisienne ne peuvent être revus que pour elle. Ni le scénario, ni le réalisateur n’importent, qu’il s’agisse de Boisrond, Molinaro ou Vadim. On sait ce qu’on va voir et on y prendra plaisir.
20.50 : Randonneurs amateurs de Ken Kwapis (2016), Émotion
Honnêtement, on n’a pas osé le voir à la sortie, effrayés par le sujet : contraindre deux de nos seniors les plus admirables à traverser à pied les Appalaches ! 162 ans à eux deux, on avait peur de les voir sinon mourir en route, du moins mettre en spectacle leur fatigue et leur déréliction. On se résoudra à les suivre tout de même ce soir : Redord ayant annoncé son retrait, il convient de profiter désormais de chacune de ses apparitions. Quant à Nick Nolte, ce jeunot (1941), il a encore de beaux films devant lui.
22.55 : Bonjour les vacances de Harold Ramis (1983), Famiz
Rien de ce qu’a fait Ramis n’est indifférent, même si tout n’est pas du niveau de Un jour sans fin. Après son premier film, Le Golf en folie (passé le 28 mars 2018), voici son deuxième titre, de nouveau avec Chevy Chase, dans la série inspirée du National Lampoon, l’équivalent US de notre Hara-Kiri canal historique. Sorti à la veille de l’été 1984, il ne semble pas qu’il ait jamais été repris ; on vérifiera s’il est toujours aussi réjouissant que dans notre souvenir, où il est placé sur le même rayon que le Kentucky Fried Movie de John Landis (1977).
20.50 : Braquage à l’ancienne de Zach Braff (2017), Premier
C’est la semaine du troisième âge : après les randonneurs cacochymes d’hier, des retraités braqueurs. Le film est un remake de Going in Style de Martin Brest (1979), inédit sous nos latitudes. Les trois octogénaires (largement) Michael Caine, Morgan Freeman et Alan Arkin - on y adjoindra Ann-Margret, qui n’en est pas loin - semblent avoir pris un plaisir intense. Il faut reconnaître que voler une banque qui les a escroqués répond à une exigence morale compréhensible.
20.50 : The Last Show de Robert Altman (2006), Club
Le film étant sorti en France un mois après la disparition de son auteur, a été qualifié de "film testamentaire". Certes, d’autant qu’Altman y a multiplié les traces prémonitoires (ce spectateur mystérieux et fantomatique qui hante les balcons du Fitzgerald Theater) et que l’impression de fin d’époque est prégnante - la salle va disparaître, les chanteurs country qui s’y produisent sont d’un autre temps. Tristesse du présent. En 1970, Brewster McCloud, héros du premier film important du cinéaste, cherchait obstinément à s’envoler pour oublier le réel. En 2006, l’adolescente Lindsay Lohan, le mobile greffé sur l’oreille, ne cherche qu’à placer des fonds de pension. Meryl Streep est géniale et tous ceux qui l’entourent, Kevin Kline, Woody Harrelson, Lily Tomlin, presque autant.
20.50 : Gatsby le magnifique de Jack Clayton (1973), Classic
Pas programmé depuis le 27 décembre 2014. Le héros de Scott Fitzgerald a toujours fasciné Hollywood, puisque quatre versions y ont été tournées. On ne connaît pas la muette (1926), mais Warner Baxter, fort bon acteur au demeurant, ne nous paraît pas l’interprète idéal, pas plus qu’Alan Ladd, entre deux polars, dans celle de 1949. Redford était à l’époque celui qui se rapprochait le plus du personnage - en tout cas, plus que Di Caprio, trop énervé, dans celle de 2013. Mia Farrow est très juste en Daisy.
20.50 : Bronco Apache de Robert Aldrich (1954), TCM
Pas inédit, mais pas passé depuis le 21 août 2015 (à 22.25). De toutes façons, un tel chef-d’œuvre peut être revu tous les ans sans rien perdre de son charme ni de son éclat.
00.00 : Ils sont grands ces petits de Joël Santoni (1978), Famiz
Le réalisateur est mort l’an dernier, après une carrière en dents de scie, entamée à la fois dans l’auteurisme - Les Yeux fermés (1974), avec Gérard Desarthe - et le docu grand public - La Course en tête (1974), sur Eddy Merckx -, l’un et l’autre réussis. Le souvenir que l’on garde du film de ce soir est mitigé, Catherine Deneuve et Claude Brasseur nous ayant semblé peu crédibles en scientifiques géniaux. Mais des écrivains de confiance, Daniel Boulanger et Jean-Claude Carrière, ayant participé au scénario, on demande à revoir ce titre bien oublié. Santoni a terminé sa carrière (sur le grand écran), par un bon thriller, également oublié, Mort un dimanche de pluie (1986), d’après l’excellent roman de Joan Aiken.
20.40 : Will Penny le solitaire de Tom Gries (1968), Paramount Channel
Pour ceux qui ne l’avaient pas vu le 23 décembre 2014. On aimait encore Charlton Heston à l’époque, avant qu’il ne finisse par s’identifier à un héros de western.
20.50 : Cold in July de Jim Mickle (2014), Frisson
L’inédit du soir du bouquet Ciné+. On ne va pas chipoter, puisqu’il s’agit d’une des ultimes apparitions du grand Sam Shepard (avant ses trois derniers films en 2016). Le sujet de la légitime défense et du deuxième amendement n’est pas très neuf, mais Mickle passe sans trop faillir du film d’horreur au thriller. Don Johnson en fait un peu trop, mais c’est toujours un plaisir.
02.30 : V comme Vian de Philippe Le Guay (2011), OCS City
Téléfilm inédit (passé sur France 2 jadis) et c’est une curieuse façon de le promouvoir que de le programmer à une telle heure. Recréer Vian, on craignait le pire… Mais Le Guay est un cinéaste fin et intelligent et l’approche du personnage s’est accomplie en douceur et connivence. Laurent Lucas est un Boris fort convenable. Derrière, on joue forcément au jeu des ressemblances : Julie Gayet est-elle bien Michelle et Anna-Lena Strasse Ursula ? Qui est le plus approchant ? Didier Flamand en Paulhan, Bernard Le Coq en Queneau ou Alain Libolt en Sartre ? Mais l’essentiel est sauvegardé.
20.40 : À la recherche de la panthère rose de Blake Edwards (1982), OCS Géants
Après le sixième épisode la semaine dernière (La Malédiction repasse ce soir à 22.35), le septième : comme souvent, la courbe qualitative faiblit au fil des séquelles. Edwards, après le succès de Victor Victoria (1982) connut un passage à vide du côté de l’inspiration : d’où deux épisodes successifs de la série Pink Panther, et un remake de L’Homme qui aimait les femmes de Truffaut (1984). Ce n’est qu’en 1986 qu’il retrouvera son pep, avec Un sacré bordel.
20.50 : La Femme du gardien de zoo de Niki Caro (2017), Émotion
Pour quelle raison le film n’est accessible qu’en DVD, on ne sait. C’est donc une découverte. Niki Caro est une bonne directrice d’acteurs - souvenons-nous de Charlize Theron dans L’Affaire Joey Aimes (2006) - et on peut être certain qu’elle a bien utilisé Jessica Chastain dans cette histoire de Justes abritant des Juifs dans le zoo de Varsovie.
20.50 : La Chambre du fils de Nanni Moretti (2001), Club
Surprise ! Aucune trace d’un passage sur le câble dans nos notes ! On explique mal cette absence, Moretti n’étant pas négligé par les programmateurs. Rien à dire de cette Palme totalement méritée, sinon que c’est un film déchirant.
20.50 : La Vieille Fille de Jean-Pierre Blanc (1971), Classic
Le film fut un succès, inattendu pour une très simple histoire de rencontre et d’apprivoisement entre un célibataire bougon et une "vieille fille", terme heureusement désuet. Noiret et Girardot y jouaient sur le fil et tout était dans cette modulation. Le réalisateur n’a pas confirmé - aux yeux du public, car D’amour et d’eau fraîche avec Miou-Miou et Julien Clerc (1976) était un joli film, tout comme L’Esprit de famille (1979), sa dernière œuvre sur grand écran.