home > Films > Rocketman (2019)
Rocketman (2019)
de Daniel Fletcher
publié le jeudi 30 mai 2019

par Nicolas Villodre
Jeune Cinéma n°395, été 2019

Sélection Hors compétition au Festival de Cannes 2019

Sortie le mercredi 29 mai 2019


 


Il serait intéressant de comparer les biopics consacrés à des personnages morts à ceux dédiés aux encore vivants.
Le très réussi Ray (2004) de Taylor Hackford, initié avant le décès du pionnier de la soul, empiétait sur les deux catégories. Celui sur Liberace, réalisé en 2013 par Steven Soderbergh, et celui paru l’an dernier sur Freddie Mercury, Bohemian Rhapsody, de Bryan Singer, ont été des réussites sur les plans technique et artistique et des succès au box-office. (1)


 

Que dire du film de Dexter Fletcher qui retrace la carrière de Reginald Kenneth Dwight, plus connu sous le nom de Elton John ?

Le compositeur-interprète britannique de pop music le plus célèbre après les Beatles (dont il a pris le relais) méritait sans doute de devenir objet cinématographique avant de passer l’arme à gauche. À l’issue de la première cannoise du film, il a adoubé son double écranique.


 

Il faut reconnaître que le comédien-chanteur Taron Egerton y est excellent et qu’il donne une image flatteuse de son modèle - ne serait-ce que parce qu’il est bien moins rondouillard que la vedette internationale. L’enfant-acteur Matthew Illesley, talentueux et malicieux, n’est pas mal non plus dans la partie concernant les années cinquante, celles de sa formation à la Royal Academy of Music.


 


 

Le long métrage a un gros quart d’heure de trop ou peut être ressenti comme tel, en raison du prêchi-prêcha emmiellant la deuxième partie du récit. Le succès, c’est bien connu, est source d’infélicité et de solitude et le metteur en scène joue avec un peu trop d’insistance sur la corde sensible.


 

Pour le reste, l’essentiel de la vie d’Elton John est livré sans complaisance. Que ce soit la rigidité du paternel, un militaire taciturne, austère et... jazzophile ; le dévergondage d’une mère immature, indifférente, légère, dans tous les sens du terme, tout le contraire de la bienveillance de la grand-mère maternelle ; l’usage abusif de toutes les substances illicites et généralement addictives ; l’homosexualité exhibée dès le début des années 70 ; les exubérances vestimentaires et lunetières...


 

N’était ce point de détail, le film montre bel et bien la virtuosité pianistique d’Elton John, son don de composition qui lui a permis d’enchaîner les hits, l’étendue d’une palette qui va du morceau énergique à la ballade la plus sirupeuse.


 


 

Les séquences les plus intéressantes sont mises en scène à la manière d’un musical : les parties chantées et dansées se fondent alors "naturellement" à celles dialoguées ou jouées. Les chorégraphies de groupe de Adam Murray, pour la plupart filmées en plein air, sont tout aussi dynamiques que les tunes bourrés de swing du pianiste.
Le hasard a voulu que le film s’achève sur le clip, remonté et mis à jour, I’m Still Standing (1983), qui fut tourné sur la Côte d’Azur et en grande partie in situ, à Cannes.

Nicolas Villodre
Jeune Cinéma n°395, été 2019

1. Ray de Taylor Hackford (2004), biographie de Ray Charles (1930-2004), Oscar du meilleur acteur pour Jamie Foxx ; Ma vie avec Liberace (Behind the Candelabra) de Steven Soderbergh (2013), épisode de la vie du pianiste Władziu Valentino Liberace (1919-1987) ; Bohemian Rhapsody de Bryan Singer (2018), biographie de Freddie Mercury (1946-1991), 4 Oscar, dont celui du meilleur acteur pour Rami Malek.


Rocketman. Réal : Daniel Fletcher ; sc : Lee Hhall ; ph : George Richmond ; mont : Chris Dickens ; mu : Matthew Margeson. Int : Taron Egerton, Jamie Bell, Richard Madden, Matthew Illesley, Bryce Dallas Howard, Stephen Graham (USA-Grande-Bretagne, 2019, 121 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts