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Halte (la) (2019)
de Lav Diaz
publié le mercredi 31 juillet 2019

par Lucien Logette
Jeune Cinéma n°395, été 2019

Sélection Quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes 2019

Sortie le mercredi 31 juillet 2019


 


On sait que, comparé à Lav Diaz, Bela Tarr, c’est du Tex Avery. Le cinéaste philippin semble ne pas savoir que le travelling et la couleur ont été inventés. D’où ce cinéma du plan fixe, quasiment sans recadrage et qui travaille sur la profondeur de champ. Il n’est pas le seul à pratiquer ce cinéma immobile, mais il émane de ses films (en tout cas de celui-ci) une fascination absente de bien d’autres et qui ne tient pas seulement à la tension interne des plans. Il y a là une temporalité particulière - certaines scènes se prolongent d’une ou deux minutes sans justification - qui distend la réalité.


 

À part ça, c’est à peu près incompréhensible si on ne s’accroche pas : au bout de deux heures, avant d’atteindre la moitié du film, les relations entre les différents personnages (les rebelles, la buveuse de sang frais) ne sont toujours pas éclaircies.


 

Tout se passe la nuit (dans un noir & blanc magnifique), il pleut presque sans arrêt, rien n’est fait pour le confort du public.
Mais le portrait du dictateur fou est la première transposition allégorique à l’écran du président Duterte - tel Ubu, il envisage de tuer la moitié des habitants hostiles pour ne garder que ses supporters.


 

Plus réussi et convaincant que Norte (1), dont une bonne partie des 255 mn paraissait inutile, The Halt, tout en offrant les caractéristiques habituelles - longueur démesurée, obscurités visuelle et narrative -, parvient à les faire oublier.
Est-ce parce que l’aspect politique est cette fois-ci plus marqué, pas déguisé sous des affèteries, que le tableau du néofascisme philippin (même si l’action est censé se passer en 2034) est fort explicite ?


 


 

Rendre compte aussi justement d’une situation avec des bouts de ficelle (il ne doit pas y avoir en tout plus de vingt figurants et une dizaine d’acteurs principaux, et Lav Diaz assure la photo, le design et le montage), c’est une performance.

Lucien Logette
Jeune Cinéma n°395, été 2019

1. Norte, la fin de l’histoire (Norte, hangganan ng kasaysayan) de Lav Diaz (2013) sélection Un certain regard au Festival de Cannes 2013.


La Halte (Ang hupa). Réal, sc, mont, déc : Lav Diaz ; ph : L.D. & Daniel Uy. Int : Joel Lamangan, Piolo Pascual, Shaina Magdayao, Pinky Amador (Philippines, 2019, 276 mn).



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