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Choix d’Ali (le) (2018)
de Amor Hakkar
publié le mercredi 11 décembre 2019

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°398, décembre 2019

Sortie le mercredi 11 décembre 2019


 


Chaque film de Amor Hakkar est une nouvelle pierre apportée à son édifice de l’analyse de la société et de l’âme humaine.
Après La Maison Jaune qui traitait de l’épreuve de la mort, Quelques jours de répit qui abordait le problème de l’exil et La Preuve, drame de la stérilité, voici maintenant Le Choix d’Ali, qui affronte avec courage et tendresse le problème gravissime de l’homosexualité dans la religion musulmane, tabou des tabous.


 

Réalisé avec peu de moyens, le cinéma de Amor Hakkar fait cependant toujours mouche, et n’est pas seulement promoteur de films à thèmes, mais de vrais sujets. Ce dernier film en est un exemple, s’accordant des plans et des hardiesses quelquefois étonnantes, mais toujours sensibles et utiles. "Mes sujets sont souvent axés sur l’être humain à un instant donné de sa vie, alors qu’il est confronté à une difficulté, un dilemme, un choix crucial et ses conséquences" confie le réalisateur.


 

Outre le problème de l’homosexualité, traité avec délicatesse mais sans ellipse, Le Choix d’Ali offre aussi un beau portrait de la famille musulmane en France, coincée entre modernité et tradition. Ici, celle d’Ali, installée à Besançon, a rejeté depuis longtemps l’un des fils en raison de ses orientations sexuelles. Personne n’ose aborder le problème frontalement, même pas sa sœur, pourtant la plus proche du héros. Il a suffi d’un événement familial grave pour qu’Ali quitte Paris, son petit ami, l’insouciance de la vie dans la capitale et son métier de serveur. Tout bascule et les démons enfouis ressurgissent.


 


 

Ce retour permet à Amor Hakkar de dresser un tableau de la religion musulmane dans la province française, coincée entre le modernisme, les paroles des religieux et le poids immense de la famille, même si elle ne se montre pas particulièrement intégriste, loin de là. Par-ci, par-là, on sent les liens qui unissent Ali à sa mère, à sa sœur, et à son jeune frère qu’il n’a pratiquement pas connu puisqu’il a quitté le foyer familial depuis très longtemps.


 

Servi par la belle photo de David Moerman et la musique habituelle de Joseph Macera auquel se sont adjoints Philippe Jakko et Philippe Fagnoni, le film est aussi un réussite grâce au jeu des acteurs, notamment Yassine Benkhadda qui parvient, tout en retenue, à donner corps et âme à ce jeune homme déchiré entre ses aspirations au bonheur et le respect de la famille et des traditions.


 

C’est le drame que vivent tous ceux qui tentent de se débarrasser d’un carcan, qu’il soit social, religieux ou psychologique. Mais comme on le constate ici, le rejet de l’homosexualité est malheureusement toujours autant ancré dans les mentalités et conduit souvent les victimes au désespoir, un désespoir parfois suicidaire.
D’où le courage de Amor Hakkar qui continue à dénoncer ce fléau et à le combattre.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°398, décembre 2019


Le Choix d’Ali. Réal, sc : Amor Hakkar ; ph : David Moerman ; mont : Lyonel Haberbush ; mu : Joseph Macera, Philippe Jakko, Philippe Fagnoni. Int : Yassine Benkhadda, Sophia Chebchoub, Hafida Tahri, Florian Guillaume, Yassine Chioukh (France, 2018, 93 mn).



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