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Dernière Vie de Simon (la) (2019)
de Léo Karmann
publié le mercredi 5 février 2020

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°399-400, février 2020

Sortie le mercredi 5 février 2020


 


Pour un premier long métrage, Léo Karmann et sa coscénariste Sabrina B. Karine n’ont pas choisi la facilité. Il y a des années qu’ils ont ce scénario en tête sans pouvoir le tourner. Leur film rend hommage au cinéma qu’ils aiment et qui a bercé leur jeunesse, par exemple celui de Spielberg, et notamment E.T.


 

La première scène montre les lampions d’une fête foraine, puis la déambulation quasi somnambulique d’un jeune homme qui finit par s’acheter une barbe à papa. Nous sommes déjà en plein dans une approche poétique et étrange. On découvre très rapidement que ce jeune homme, Simon, orphelin qui vit dans une maison d’accueil, a le don de se transformer en la personne qu’il désire, à condition de l’avoir touchée au préalable.


 

Le récit commence comme un conte fantastique et ira crescendo vers le polar et enfin le thriller, débouchant sur le contraire du happy-ending. Au cours d’une fête sur un bateau à laquelle son groupe participe, il fait la connaissance d’un garçon de son âge et de sa sœur. Une grande amitié va naître entre eux, une chance pour Simon qui rêve d’être adopté par une famille aimante. Son "transformisme", une fois accepté comme une donnée, se conçoit assez aisément, à condition de ne pas se replier sur des positions cartésiennes. Et le réalisateur est parvenu à bien camper ses personnages, dans un lieu - une belle maison au bord de la mer bretonne - et une atmosphère peu à peu anxiogène.


 

Mais vers la moitié du film, les choses se gâtent. On peine à se retrouver dans toutes ces transformations : les deux personnages censément frère et sœur vont finir par vivre une histoire d’amour, seulement, bien sûr, au moment où Thomas, le frère, redevient Simon, le petit ami. On a frisé l’inceste et le franchissement d’un tabou.
En outre, cette interchangeabilité des deux garçons a comme un goût non-dit d’homosexualité non-assumée, comme si Simon avait trouvé en Thomas sa moitié (platonicienne) d’orange, rendant l’histoire encore plus étrange. Comme les filles sont plus futées que les garçons, Madeleine, dite Mad (comme "folle"), découvrira le pot-aux-roses. En fait, connaissant, comme son frère, le secret de Simon, elle n’aura aucun mal à découvrir que les deux garçons n’en font qu’un. Cette incarnation de la double figure de Janus donne lieu à des effets spéciaux particulièrement réussis.


 

Malheureusement, vers la fin, le film perd à la fois en intensité et en crédibilité, tous ces passages d’un rôle à l’autre compliquant une narration qui aurait gagné à être resserrée. L’épilogue fait preuve d’une grande virtuosité, mais on a compris que Simon, dans la clinique où est soignée Mad, ne va cesser de changer de corps pour échapper à la police qui le recherche. Laissons au spectateur la surprise, de taille, du plan final…

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°399-400, février 2020


La Dernière Vie de Simon. Réal, sc : Léo Karmann ; sc : Sabrina B. Karine ; ph : Julien Poupard ; mont : Olivier Michaut-Alchourroun ; mu : Erwann Chandon. Int : Benjamin Voisin, Martin Karmann, Camille Claris, Nicolas Wanczycki, Julie-Anne Roth (France, 2019, 103 mn).



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