Gianni Di Gregorio a réalisé, dans le quartier romain populaire du Trastevere, Citoyens du monde, sur le conseil de son ami Matteo Garrone. On aperçoit d’ailleurs un clin d’œil à Pinocchio, sous la forme d’une ancienne édition du conte dont le professeur doit malheureusement se séparer pour pouvoir quitter le pays avec ses amis.
L’histoire est belle, comme peuvent l’être toutes les histoires que l’on aimerait vivre, pleine d’amitié, de légèreté, de simplicité et d’humanité. Dans la situation chaotique, chômage et crise migratoire, de l’Italie d’aujourd’hui, les retraités vivent avec une pension dérisoire qui les poussent bien souvent à quitter le pays. Beaucoup rêvent du Portugal.

Citoyens du monde imagine la rencontre entre trois Romains, un professeur de latin (Gianni Di Gregorio), Attilio (Ennio Fantastichini) et Giorgietto (Giorgio Colangeli), retraités solitaires, qui échafaudent toutes sortes de plans pour préparer financièrement leur départ aux Açores, pour une nouvelle vie. Un quatrième personnage apparaît, Abu (Salih Saasin Khalid) vrai migrant, dont la présence discrète influence l’attitude des trois amis.

Issu de la comédie italienne classique mêlant drôlerie et désespérance, où une forme de burlesque côtoie la critique sociale, Gianni Di Gregorio parvient à restituer le climat euphorique de ces belles années, où la tradition du partage, de l’entraide et de l’attention mutuelle et un immense plaisir d’être ensemble étaient de mise, même dans la pauvreté.
L’interprétation exceptionnelle, le naturel et l’authenticité de leurs relations révèlent le profond attachement des trois amis. Leur errance dans Rome et sa banlieue sous différentes lumières est fort plaisante et la quête qui remplit la cagnotte illustre la générosité et la solidarité du peuple italien.

Le choix de partir n’appartient pas forcément à celui que l’on croit, ni ne dépend des moyens mis en œuvre ; c’est aussi une philosophie. Citoyens du monde, est une comédie qui n’en a pas l’air ; le film, par la sympathie qui y règnent, s’apparente à une fable dont la morale est une belle réponse à la politique d’exclusion de Matteo Salvini et de la droite italienne des années précédentes.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma en ligne directe

Citoyens du monde (Cittadini del mondo). Réal : Gianni Di Gregorio ; sc : GDG & Marco Pettenello ; ph : Gogo Bianchi ; mont : Marco Spoletini. Int : Gianni Di Gregorio, Ennio Fantastichini, Giorgio Colangeli, Salih Saasin Khalid, Roberto Herlitzka (Italie, 2019, 91 mn).