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Belle Jeunesse (la) (2014)
de Jaime Rosales
publié le mardi 9 décembre 2014

par Philippe Roger
Jeune Cinéma n°360, été 2014

Sélection Un certain regard Cannes 2014

Sortie mercredi 10 décembre 2014

En une dizaine d’années et quelques œuvres étonnantes, Jaime Rosales est devenu l’un des cinéastes européens qui comptent, un des rares à prendre encore au sérieux l’idée d’un cinéma comme langage.
Une telle exigence l’a fait qualifier de formaliste alors qu’il est un styliste.

Son cinquième essai, La Belle Jeunesse (ironique antiphrase) marque une étape de transition dans son parcours.

Après s’être aventuré au plus loin dans une poésie personnelle qui a donné naissance à la métaphysique du profond Rêve et silence (2012), chef-d’œuvre incompris, Rosales entame un deuxième cycle avec cette Belle Jeunesse où il reprend les enjeux de son premier long métrage, Les Heures du jour (2003), traités avec l’expérience acquise.

Le résultat est aussi admirable qu’inattendu.
Si l’on retrouve les fondamentaux de ce cinéma (une attention documentaire à la réalité, un traitement fictionnel de matériaux cinématographiques disparates), ceux-ci se trouvent ici bousculés par de fulgurantes ruptures de ton.

Le film s’ouvre de façon sage par le naturalisme prisé de nos jours (caméra à l’épaule, recadrages voyants) ; un réalisme apparent déjà mis en cause par un jeu de focales qui mine les plans rapprochés.
On suit un couple de jeunes Espagnols mal intégrés dans une société en crise.

Un détail met sur la piste du sujet réel : comme les adultes, ces jeunes sans idéal ni avenir passent leur temps à consulter les écrans, surtout ceux de leurs téléphones.

C’est à une société malade de sa mise en représentation que s’affronte le film : les déchirements de l’image qui vont former autant de coups de théâtre (plan séquence d’un casting porno, puis cadrage expérimental d’une agression nocturne, enfin cassure radicale du récit par le basculement dans l’univers du jeu vidéo et des visuels accélérés de téléphonie et d’internet) ne disent qu’une seule chose : c’est à la possible mort de l’image que nous fait assister, en témoin moral, l’esthéthicien Jaime Rosales.

Philippe Roger
Jeune Cinéma n°360, été 2014

La Belle Jeunesse (Hermosad juventud). Réal, sc : Jaime Rosales et Enric Rufas ; ph : Paul esteve ; mont : Lucia Casal ; décor : Victoria Paz Alvarez ; cost : Betrz Robiedo ; son Nicolas Tsabertidis. Int : Ingrid Garcia Jonsson, Carlos Rodriguez, Inma Nieto, fernando Barona (Espagne, 2014, 100 mn).

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