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Kiosque (le) (2020)
de Alexandra Pianelli
publié le mercredi 6 octobre 2021

par Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 6 octobre 2021


 


L’auteure, Alexandra Pianelli, ne se définit pas comme cinéaste mais comme plasticienne. Pour dépanner sa mère, qui tient un kiosque à journaux place Victor-Hugo à Paris, elle accepte de la remplacer quelques semaines - pense-t-elle. Cet intérim durera six ans. Le film qu’elle a tiré de cette expérience nous la conte. En tout petit format, pourrait-on dire, au moyen de son téléphone portable. Le kiosque, on ne le verra qu’en partie, de son point de vue, de l’intérieur. Postée à la place de la marchande, Alexandra Pianelli capte un champ réduit : les présentoirs se vidant, les passants défilant, les clients approchant, le fond de décor, la façade d’une agence du Crédit du Nord.


 

On assiste, en somme, à un huis clos. La marchande de journaux, comme on sait, ne quitte jamais son kiosque. D’elle, le spectateur ne verra que les mains et les bras, ne percevra que le son de la voix.


 


 


 

En off, Alexandra Pianelli décrit son expérience et ce qui la touche personnellement. Son théâtre est celui de ce petit monde fait d’habitués, de clients ou de simples voisins, de touristes ou de gens de passage qui lui demandent leur chemin, de familiers qui sont parfois devenus des amis. Parmi eux, se trouve Damien, un SDF qui ne cesse de perdre son chat, un jeune Indien qui vend des fruits à la sauvette, des dames chics, des messieurs d’un certain âge, une petite fille que la mère confie à sa garde le temps de passer à la banque. Il n’est jamais question de choses susceptibles de fâcher, de religion ou de politique.


 


 

Paradoxalement, on ne commente pas les nouvelles qu’elle a pour fonction première d’annoncer - le kiosquier étant le crieur public urbain, contemporain. On échange donc de petits riens. On s’offre des cadeaux à l’occasion. Le ton est toujours enjoué. Sa caméra, en l’occurrence son smartphone, est fixée à son front, comme un troisième œil, ou bien posée sur trépied. Ses interlocuteurs se savent filmés. Ils se prêtent volontiers au jeu. Chacun, et surtout elle, se sait en représentation et veut donner la meilleure image de soi-même. Est-ce pour autant du cinéma direct ? En tous les cas, un va-et-vient constant entre réel et fiction, entre pris sur le vif et comédie sociale.


 


 

Qui plus est, à ses moments perdus, la jeune femme croque ses habitués, lesquels deviennent des personnages de bande dessinée. Le film vire alors à la démonstration de son incontestable talent en la matière, l’artiste prenant le pas sur la chroniqueuse. Sur cette trame se tisse l’histoire, celle de la crise de la presse écrite dont la réalisatrice tient à traiter et à témoigner. Le thème de la disparition des journaux est rappelé à plusieurs reprises dans le film, notamment par les interventions de sa mère qui a subi celle-ci et qui prend la décision de fermer boutique.


 


 

Le sujet est également traité visuellement, sous forme d’un montage de "Unes" de journaux alarmistes, d’illustrations graphiques et de plastiques l’illustrant. Le ton du film n’est jamais dramatique. L’artiste-marchande de journaux donne une fête d’adieux à laquelle sont conviés clients et amis. La dernière scène est le démontage du kiosque et son évacuation par camion, à la nuit tombée.

Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe


Le Kiosque. Réal, sc, son : Alexandra Pianelli ; ph : AA.L., Margaux Vendassi & Zoé Chantre ; mont : Léa Chatauret ; mu : Olaf Hund (France, 2020, 76 mn). Documentaire.



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