home > Films > Simone Barbès ou la vertu (1980)
Simone Barbès ou la vertu (1980)
de Marie-Claude Treilhou
publié le mercredi 1er juin 2022

par Luce Vigo
Jeune Cinéma n°127, juin 1980

Sortie le mercredi 27 février 1980


 


Le plaisir que l’on prend à voir Simone Barbès ou la vertu, premier film de Marie-Claude Treilhou, est d’autant plus fort que s’ajoute à un sentiment de joie et de tristesse étroitement mêlés celui de l’étonnement joyeux qu’un tel film puisse exister : si beau, si plein d’humour, si tragique, si simple et si riche de choses dites et non dites qui restent longtemps en soi, à "travailler" les images de la vie que l’on a dans la tête, et la représentation que nous en donne habituellement le cinéma.


 

Ce n’est pas tant le sujet même du film qui crée cette surprise, cet ensemble d’émotions, que la façon dont Marie-Claude Treilhou le traite. La forme trouvée : dans le temps réel ou presque d’une heure dix-sept de projection, la nuit solitaire d’une fille de Paris qui se passe dans trois lieux clos cadrés toujours au plus près, des lieux bien connus de la réalisatrice : "Ces lieux, je les connaissais... pas ceux du film... mais d’autres, les mêmes...".

C’est d’abord le hall d’un cinéma porno où deux ouvreuses bavardent, alors qu’en arrière-fond se fait entendre la bande-son du film porno - cris, râles, soupirs - et que les clients arrivent, sortent, certains essayant de se glisser d’une salle à l’autre, et que dans la rue aperçue du hall se jouent d’autres scènes.


 


 

C’est ensuite une boîte pour lesbiennes où se nouent d’autres drames, où s’entendent, se voient d’autres solitudes, et toujours celle de Simone Barbès, tenace, profonde et que ne démentent pas, depuis qu’elle est à l’image, ni la mobilité de son visage, ni la vivacité un peu acide de son parler direct, toujours tendu malgré un apparent détachement.


 


 

C’est enfin une voiture où Simone Barbès et un homme continuent de promener leur solitude à la recherche d’un bistrot où ils ne trouveraient sans doute pas plus à se dire que maintenant, dans cette quête et cette promiscuité que crée la voiture et qui ne peut les rapprocher. La soirée se termine, la voiture repart, le pas de Simone Barbès s’éloigne alors que s’éteignent les réverbères du canal Saint-Martin. C’est le petit matin.
"C’est, dit Marie-Claude Treilhou, un film d’horreur fondé sur le contraire de l’horreur, la fantaisie possible à aménager à partir de l’horreur".


 

En première partie, un film de court-métrage de Gérard Frot-Coutaz, Jeux d’ombres. Encore une histoire de solitaire, celle d’un vieil instituteur en retraite dont on partage, en vingt-trois minutes, une journée "à la fois banale et particulière". (1)

Luce Vigo
Jeune Cinéma n°127, juin 1980

1. Gérard Frot-Coutaz (1951-1992).
Jeux d’ombres (1979), son 3e court métrage, est oublié dans la plupart de ses filmographies.


Simone Barbès ou la vertu. Réal : Marie-Claude Treilhou ; sc : M.C.T & Michel Delahaye ; ph : Jean-Yves Escoffier ; mont : Paul Vecchiali ; mu : Roland Vincent
Int : Ingrid Bourgoin, Martine Simonet, Michel Delahaye, Pascal Bonitzer, Sonia Saviange, Max Amyl, Noël Simsolo (France, 1980, 77 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts