home > Livres & périodiques > Livres > Costa-Gavras (livre)
Costa-Gavras (livre)
Va où il est impossible d’aller (2018)
publié le vendredi 12 août 2022

par Robert Grélier
Jeune Cinéma n°390, septembre 2018

Costa-Gavras, Va où il est impossible d’aller, Paris, éd. du Seuil, 2018.


 


En plus de cinq cents pages, le réalisateur de Z (1969) nous raconte sa vie de cinéaste. Mais pas seulement, même si celle-ci est rythmée par les projets de films qu’il prépare et réalise, car Costa-Gavras, en homme du 20e siècle, dit tout de ce qu’il a vu et entendu. Aussi bien les histoires intimistes - la vie de sa famille (les naissances des enfants et petits-enfants occupent une place importante) - que les réunions avec ses pairs, ses amis et les hommes politiques. On imagine le journal qu’il a pu écrire au cours de son existence. Beaucoup d’anecdotes, trop à certains moments, à tel point que le lecteur a des difficultés à retenir l’essentiel.

Costa-Gavras est un homme de conviction et pour ce faire, il n’hésite pas à employer les ficelles de la démonstration. Il n’a pas froid aux yeux, dit ce qu’il pense, même si, parfois, il regrette ses propos, et, quel que soit son interlocuteur, a toujours un raisonnement clair. Ce qui ne l’empêche pas de réviser son opinion, suite à de nouvelles informations.

Va où il est impossible d’aller est à l’image de ses films. Cet ouvrage voudrait être les propos d’un honnête homme, inséré dans son temps, mais à force d’être trop personnalisé, l’auteur apparaît quelque peu égocentrique. Les discussions débouchent rarement sur une réflexion et le lecteur souhaiterait que le narrateur aille plus loin. Exception faite des séances de travail avec les coscénaristes, notamment lors de la préparation de certains films importants comme L’Aveu (1970) où les allers et retours entre l’auteur Artur London (1), le scénariste Jorge Semprun et le réalisateur furent très nombreux. L’un des écueils à éviter n’était-il pas celui de l’infidélité au récit autobiographique ?

Homme engagé dans les affaires publiques, il le fut plus en humaniste qu’en militant, ce qui ne l’empêche pas de réaliser des œuvres profondément ancrées dans le politique. Son regard sur les États-Unis et, plus particulièrement sur Hollywood, est lucide. Preuve en est quand il fait affirmer à Charles Denner dans Z  : "Il faut toujours dire du mal des Américains, même quand on ne sait pas pourquoi, eux, ils savent".

À des reproches qu’on lui fait sur le conformisme des situations traitées dans ses films, il répond : "Je montre ce qui me déplaît, ce qui me choque, ce qui m’émeut, positivement ou négativement. Je le fais avec conviction, mais aussi avec la séduction que j’ai découverte en apprenant le cinéma. Avec les colères et les haines que j’ai pu avoir, avec mes passions aussi, enfin, avec des sentiments indicibles, mais qui transparaissent dans les images que je réalise".

En ignorant le trop-plein d’anecdotes, on découvrira au récit de chacun des films les difficultés que Costa-Gavras a dû affronter pour mener à bien sa carrière prestigieuse.
Déplorons quelques coquilles malencontreuses : "Chris Maker" au lieu de Marker, Stéphane "Célarié" (Mars films) pour Stéphane Célérié, Athinéa à la place d’Athéna…

Robert Grélier
Jeune Cinéma n°390, septembre 2018

1. Artur London, L’Aveu, Paris, Gallimard, 1968.


Costa-Gavras, Va où il est impossible d’aller. Mémoires, Paris, éd. du Seuil, 2018, 528 p.



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts