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Azor (2021)
de Andreas Fontana
publié le mercredi 12 octobre 2022

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n°417-418, octobre 2022

Sélection officielle de la Berlinale 2021
Sortie le mercredi 12 octobre 2022


 


Ce premier long métrage argentino-franco-suisse de Andreas Fontana a été sélectionné à Berlin en 2021. Dans le rôle principal, le sombre Fabrizio Rongione interprète le nouveau banquier suisse Yvan De Wiel, qui doit se rendre en Argentine pour remplacer son associé Keys, mystérieusement disparu. Le pays est alors en pleine dictature militaire. Yvan doit renouer avec les clients de la banque, ceux qui travaillaient avec Keys. Il est prêt pour cela à négocier avec la junte militaire, la corruption, le pouvoir dissimulé, sujet à toutes les manipulations et manœuvres les plus déloyales. Tel le religieux incarné magnifiquement par Pablo Torre Nilson, absolument repoussant de saloperie.


 

Le drame socialo-politique débute par des tableaux peints à la manière de Edward Hopper, une surprise d’une possible picturalité. On découvre effectivement, dans Azor, un goût particulier du réalisateur pour la fabrication et l’esthétisation des images. Des plans sobres, relativement fixes, peu habités sinon de quelques personnages principaux, des angles de vues cadrés sur les visages, expressions souvent mutiques, peu de mouvements, pour ne pas dire absence de mouvements.


 


 

L’atmosphère est celle, feutrée, des grandes habitations bourgeoises entourées de parcs de plusieurs hectares, où des chevaux montés par les propriétaires avancent d’un pas tranquille entre les arbres. Aucune foule, aucune réunion bruyante, des conversations à bas bruit, chuchotées, dans des salons privés. Le personnage de Keys est le guide absent de l’intrigue et du suspense aussi mystérieux que dramatique.


 

Le scénario, écrit par Andreas Fontana et Mariano Llinas, est d’une force silencieuse exceptionnelle ; rien ne filtre, rien ne transpire, le film est un bloc de silence aussi dense que la végétation, aussi opaque que l’écho des pièces vides des maisons, déchiré par instants par la stridence sourde d’une musique qui fait froid dans le dos. Un film ponctué sans cesse par l’absence du personnage principal Keys, qui résonne comme le leitmotiv d’un drame, qui eut lieu ou peut-être pas encore, sorte d’échos permanents aux manigances et ruses des banquiers suisses à l’encontre des grandes fortunes d’Argentine. Un film énigmatique préférant rester sur le mystère d’une disparition comme certitude du pouvoir, plutôt que de déjouer les règles du secret.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n°417-418, octobre 2022


Azor. Réal : Andreas Fontana ; sc : A.F. & Mariano Llinas ; ph : Gabriel Sandru ;mont : Nicolas Desmaison ; mu : Paul Courlet. Int : Fabrizio Rongione, Stéphanie Cléau, Carmen Iriondo, Juan Trench, Pablo Torre Nilsson, Elli Medeiros (Argentine-France-Suisse, 2021, 100 mn).



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