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Signaté, Ibrahima (livre)
Un cinéaste rebelle, Med Hondo (1994)
publié le lundi 24 octobre 2022

par Robert Grélier
Jeune Cinéma n°306-397, octobre 2019

Ibrahima Signaté, Un cinéaste rebelle, Med Hondo, Paris, éd. Présence africaine, 1994.


Dans ce petit ouvrage de 127 pages, résultat d’un long entretien avec Ibrahima Signaté, Med Hondo (1) parle très peu de ses films, pensant que ce n’est pas à lui de gloser sur son travail.

En huit chapitres - l’Afrique désarçonnée, l’unité africaine, l’intégrisme, l’immigration, les femmes, les langues, le marxisme et le tribalisme -, il développe sa réflexion à l’égard des thèmes qui lui sont chers.

Non seulement il donne son point de vue, mais il intervient dans le champ de ses adversaires en bousculant les idées reçues. Par exemple, il ne mâche pas ses mots quand il fustige "le pseudo-cinéma anthropologique" de Jean Rouch :"C’est un homme qui, au fond, nous a toujours regardés comme si nous étions des insectes. À partir d’une expression culturelle, il crée un folklore. À force de nous vouloir du bien il nous met dans un bocal. C’est un cinéma de mépris."
Ou encore quand il raconte ses démêlés avec la censure dans un paragraphe intitulé "La censure existe, je l’ai rencontrée".

Il déclare qu’aujourd’hui l’Afrique ne contrôle ni son passé, ni son présent, ni, a fortiori, son futur. "La censure existe, brutale ou insidieuse, elle est d’abord économique, puis politique, ou les deux à la fois. Elle provoque l’autocensure chez tout créateur qui veut exprimer sa vision du monde, donner du sens à ses idées dans un monde ou les idéaux de l’homme, qui ont nom justice et égalité des droits, sont quotidiennement piétinés".

Lui qui fut un éternel immigré, affirme que "le délit de faciès a encore de beaux jours devant lui", et révèle ainsi sa pensée : les Antillais ne seront jamais considérés comme des Français à part entière.

Robert Grélier
Jeune Cinéma n°306-397, octobre 2019

* Cf. les entretiens avec Med Hondo : Jeune Cinéma n°48, juin 1970 ; Jeune Cinéma n° 81, septembre 1974 ; Jeune Cinéma n° 121, septembre 1979.

1. Abib Mohamed Medoun Hondo, dit Med Hondo, est né le mai 1936 et décédé le 2 mars 2019.
On le connaît surtout comme réalisateur (14 films). Mais il était aussi scénariste et producteur, ainsi que star du doublage (près de trois cents films). Il fut aussi un homme de théâtre. Comédien, il a joué dans dans onze pièces de théâtre. Notamment avec le metteur en scène Jean-Marie Serreau, dans La Tragédie du roi Christophe de Aimé Césaire, au théâtre de l’Odéon en 1965, et dans Les ancêtres redoublent de férocité de Kateb Yacine, au TNP Théâtre national de Chaillot en 1967. Ainsi qu’avec Antoine Bourseiller, dans Le Métro fantôme de LeRoi Jones, au théâtre des Mathurins en 1966.


Ibrahima Signaté, Un cinéaste rebelle, Med Hondo, Paris, éd. Présence africaine, 1994, 127 p.



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