Ce premier long métrage de Mikko Myllylahti dérange assurément tant il grince. Le film tourné en 35 mm dans les régions de Kainuu et Koillismaa, qui se situent dans la partie sud-est du Nord de la Finlande, juste en dessous de la Laponie, se présente à la fois comme un conte fantastique et une fable sur le sens de l’existence.

Son univers poétique est niché de l’autre côté de l’humour, dans un pays où la blancheur des paysages le dispute à la noirceur des existences face un environnement contraire. On y croise une série de personnages étranges, tels le barbier, le chanteur médium, des mineurs qui réfléchissent à des sujets philosophiques…

Pepe est un gentil bûcheron qui mène une vie calme et paisible dans un village de la région. Soudain, en deux jours, à la faveur d’un enchaînement de circonstances plus tragiques les unes que les autres, sa petite vie tranquille et heureuse bascule. Il s’en suit un périple chaotique, émaillé de violences où surgit le fantastique.

Étonnamment, Pepe reste imperturbable face aux coups du sort et continue toujours à sourire, à voir le bon côté des choses face à l’adversité. Mieux, lorsque l’insolite, le bizarre et une forme de délire s’emparent de ses proches et des villageois, il ne semble pas en être plus affecté que cela. Tout est burlesque…Tout devient absurde.

C’est son attitude étrange qui constitue le mystère de cette épopée loufoque et un peu givrée. Pepe, personnage introverti et sans émotions, réagit comme s’il détenait un secret, le secret de la vie. Comme s’il avait compris que l’existence n’avait pas de sens. Dans une scène décisive à la fin du film, entre une voiture en flammes et l’arrivée en haut de la montagne, Pepe franchit une limite entre la réalité et un au-delà. Ainsi, se retrouve-t-il encore souriant dans sa cabane avec le visage couvert de blessures.

Son optimisme apparent, sa parfaite adaptation à un monde moderne en voie de délitement et de déshumanisation, ne révèlent-ils pas au fond un espoir laconique, ou "laponique", dans l’être humain ? Et c’est précisément ce point dérangeant, voire glaçant, qu’explore le film tout du long dans une veine poétique. Une des particularités de l’humour finnois n’est-elle pas de rire de soi sans limites, au point d’accepter sa condition si absurde soit-elle devenue ? Gageons que la vision de ce film laisse aux spectateurs, une impression de "ni chaud-ni froid".

Anita Lindskog
Jeune Cinéma en ligne directe

L’Étrange Histoire du coupeur de bois (Metsurin Tarina). Réal, sc : Mikko Myllylahti ; ph : Arsen Sarkisiants ; mont : Jussi Rautaniemi ; mu : Jonas Struck ; cost : Minke Lunter. Int : Jarkko Lahti Katja Küttner Omar Abdi Cris af Enehielm Lauri Maijala Vincent Willestrand (Finlande, 2022, 99 mn).