home > Films > Pulse (2021)
Pulse (2021)
de Aino Suni
publié le mercredi 22 février 2023

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°420-421, mars 2023

Sortie le mercredi 22 février 2023


 


À partir d’une trame archi exploitée, celle en gros de l’amour impossible et des rapports de domination entre deux êtres qui croient s’aimer, Aino Suni peint le portrait de ses deux protagonistes, tout en proposant une lecture de notre monde moderne à travers deux arts qui semblent occuper aujourd’hui le devant de la scène : la danse et le rap.


 


 

Avec son documentaire Never Again sur la rappeuse Mercedes Bentso, Aino Suni a eu sa première mondiale en 2018, au Festival d’Helsinki. L’année suivante, elle prépare Pulse, son premier long métrage avec des élèves de l’ERACM, l’école d’acteurs de Cannes et côtoie l’École internationale de Rosella Hightower pour construire les scénographies des scènes de danse. Sous ses dehors hyper branchés, avec néons, cheveux aux couleurs électriques et homosexualité féminine, la jeune réalisatrice veut parler de l’universalité de l’amour. Elle pose à travers ce film la question de la difficulté d’aimer, mais surtout du passage de l’adolescence à l’âge adulte et de cette particularité qui consiste à blesser les autres, ne serait-ce que par la parole, et à détruire ce que l’on aime. Vaste sujet wildien dont elle se sort plutôt bien, si on évacue le côté un peu esbroufe de son film.


 


 

La trame narrative du film est assez basique : Elina, jeune rappeuse de 17 ans, est contrainte de quitter son pays natal, la Finlande. Elle rencontre sa nouvelle sœur par alliance, Sofia, une ballerine charismatique, qui mène une double vie faite de soirées, de garçons et de drogues. Leur amitié apparente se transforme vite en jeu de pouvoir aux conséquences toxiques.


 

Naît entre elles un rapport d’amour étrange fait de tendresse, de jalousie et même de haine, tant Elina a du mal à comprendre la psychologie et le mode de vie de sa demi-sœur qu’elle s’acharne à vouloir faire souffrir et dominer. L’âme humaine est vraiment torturée et nous ne sortirons jamais de cette aporie, preuve en est de nouveau avec ce film vénéneux malgré ses quelques maladresses.


 

Doté d’une très belle photo due à Kerttu Hakkarainen, aux costumes de Julia Fouroux et aux maquillages de Audrey Crépin, Pulse doit aussi beaucoup au casting qui nous permet de découvrir ou redécouvrir deux actrices parfaites : Carmen Kassovitz dans le rôle de Sofia et Elsi Sloan dans celui d’Elina. Elles forment à elles deux un couple toujours au bord de la rupture et de la haine, se reconstruisant sans cesse.


 


 

Le choix d’une relation homosexuelle féminine n’est pas innocent, même si la réalisatrice prend bien soin d’expliquer qu’il en irait de même avec une relation hétérosexuelle - ce qui n’est pas si évident. Son propos n’est pas d’aborder ce thème mais de parler de l’amour en général : "Le fait que l’histoire soit sombre n’a rien à voir avec le fait d’être homosexuel. Il peut s’agir de n’importe quel type d’amour gâché par la possessivité. En tant que cinéaste, je me sens attirée par les histoires qui présentent une ambiguïté morale".

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°420-421, mars 2023

* Ne pas confondre avec Pulse de Sergii Chebotarenko (2021), ou Pulse de Jim Sonzero (2006), remake de Kaïro de Kiyoshi Kurosawa (2001).


Pulse (Heartbeast). Réal, sc : Aino Suni ; ph : Kerttu Hakkarainen ; mont : Ville Hakonen ; mu : Jean-Benoît Dunckel. Int : Carmen Kassovitz, Elsi Sloan, Lucille Guillaume, Camille (France-Finlande-Allemagne, 2021, 102 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts