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Amour fou (2014)
de Jessica Hausner 
publié le mercredi 4 février 2015

par Nicole Gabriel
Jeune Cinéma n°360, été 2014

Sélection officielle Un certain regard du Festival de Cannes 2014

Sortie le mercredi 4 février 2015


 


Dans les années 1970, Heinrich von Kleist (1777-1811 a incarné la figure de l’insoumission. À l’occasion du bicentenaire de sa naissance en 1977, année des "suicides" à Stammheim de ceux que l’on désigne, dans les gazettes et au cinéma, comme "la bande à Baader", il fut incarné, par exemple, sous le traits de Heinrich Giskes, dans le très beau Heinrich de Helma Sanders-Brahms (1940-2014), elle-même disparue le 27 mai 2014, alors que le festival venait de s’achever.


 

En 2014, la Viennoise Jessica Hausner, nous donne une lecture légèrement différente d’un des suicides les plus singuliers de la littérature, sous le titre, discutable parce qu’il a déjà beaucoup servi, notamment à Françoise Hardy (pour ses mémoires), de Amour fou. Cette bretonnerie était-elle indispensable ? C’est la seule réserve que nous aurions à propos de ce film, véritable Augenweide, fête pour les yeux (et les oreilles : a-t-on jamais entendu, mieux dite, la Todeslitanei ?).

Heinrich von Kleist y est vu comme un benêt, un bêta, à la limite d’une débilité légèrement sentencieuse.


 

Le point focal, c’est elle, cette Adolfine que l’auteur du Prince de Hombourg rebaptisa, pour l’éternité, Henriette. Interprétée par Birte Schnöink, que nous avions remarquée, en 2008, toute jeune Amalia dans une production des Brigands de Friedrich von Schiller à la Schaubühne. Il était difficile de faire aussi bien que Edith Clever et sa détermination hallucinée dans La Marquise d’O de Eric Rohmer (1976). Eh bien, elle y parvient, ce petit bout de blonde aux yeux pervenche, sur qui on ne se retournerait pas, entre Brême et Francfort-sur-l’Oder.
Épouse, mère, sœur, double, image réfléchie : avec une assurance de somnambule, elle donne vie à la femme du romantisme allemand, qu’elle se prénomme Dorothea, Charlotte, Lucinde ou Diotima. Ulrike (von Kleist). Ou encore Sophie (Scholl ?). Et dont nous avons pu voir un avatar, à Cannes même, dans le personnage, tiens, d’Agathe (Mia Wasikowska), "psychopathe enjouée" et sœur de l’assassin-enfant dans Maps to the Stars de David Cronenberg (2014).

Nicole Gabriel
Jeune Cinéma n°360, été 2014


Amour fou. Réal, sc : Jessica Hausner ; ph : Martin Gschlacht : mont : Marina Ressler. Int : Birte Schnöink, Christian Friedel, Stephan Grossmann, Sandra Hüller (Autriche-Danemark-Luxembourg, 2014, 96 mn).



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