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Women Talking (2022)
de Sarah Polley
publié le mercredi 8 mars 2023

par Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma en ligne directe

Deux nominations aux Oscars 2023

Sortie le mercredi 8 mars 2023


 


Sarah Polley (1), soutenue notamment par Francès Mac Dormand, a adapté à l’écran le texte de Miriam Toews (2), qui conte, à partir d’une histoire vraie, un épisode récent de l’émancipation d’une colonie religieuse mennonite anabaptistes, d’origine néerlandaise, émigrée en Bolivie, à Manitoba.


 


 


 

La secte a presque 500 ans, mais l’action se passe en 2010 et les femmes de la communauté, droguées et violées dans leur sommeil, excédées par les brutales agressions sexuelles des hommes, cherchent à définir une riposte commune avant le retour de Klaas, le plus menaçant d’entre eux, en garde à vue pour 48 heures. (3)


 


 

Elles sont réunies dans un grange, belles et sages de tous âges, elles raisonnent bien, malgré leurs références constantes à leur religion, et comme elles ne savent ni lire ni écrire, c’est à l’instituteur, August, marginal parmi les hommes, qu’elles demandent d’enregistrer leurs débats.


 


 


 

Il y a 3 options : la résignation, la résistance, ou le départ - Loyalty, voice or exit. Il s’agit de noter les avantages et inconvénients de chaque option, les débats sont vifs, mais toutes cherchent la meilleure démarche. Elles votent, en signant par des croix sous des dessins illustrant les choix : une fois éliminé le statu quo, et après hésitations, le départ est retenu compte tenu des difficultés de la résistance.


 


 

Le héros positif, c’est peut-être Auguste qui doit éduquer les garçons, et sait que les ados impulsifs et vigoureux peuvent être dangereux : Jusqu’à quel âge les garçons doivent-ils suivre leurs mères ? À défaut de se libérer elles-mêmes, les femmes veulent avant tout protéger leurs enfants, même issus d’un viol cruel. Partir, donc. Il faut repérer la Croix du sud pour se diriger. Auguste le leur enseigne malgré le désespoir qui l’attend après le départ des femmes.


 


 

C’est une ambiance à la Michael Haneke, austère et attentive. On cerne la composante sociale du viol, on s’étonne que l’alcoolisme et la violence masculine soient admis dans cette secte en principe pacifiste (4). On comprend que l’enfermement hors du temps produise des situations qui ne permettent que la fuite.


 


 

Unité d’action, unité de lieu, unité de temps, c’est plus un pièce de théâtre qu’un roman. La musique, avec ses solos de guitare et ses chants, insufflent une inspiration libératrice qui compense la gravité des enjeux. Une belle date pour la sortie en France de ce beau film, un 8 mars.

Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Women Talking est le 4e long métrage de l’actrice canadienne Sarah Polley, née en 1979.

2. Miriam Toews, Women Talking, New York, Alfred A. Knopf, 2018. Ce qu’elle disent, traduction de Lori Saint-Martin & Paul Gagné, Paris, Buchet-Chastel, 2019.

3. Entre 2005 et 2009, des hommes de la communauté endormaient les familles et violaient le femmes et les filles, les victimes étaient âgées de 3 à 65 ans. En août 2011, huit accusés sont jugés coupables, et condamnés à 25 ans de prison.

4. Exemple extrême de la notion de "culture du viol" inhérente au patriarcat - apparue aux USA chez les féministes à partir des années 60, et désormais identifiée, reconnue et combattue en Occident -, cette histoire, basée sur des faits réels, vient, selon Sarah Polley, d’une interprétation fondamentaliste des Écritures, amplifiée par l’isolement de la communauté.


Women Talking. Réal, sc : Sarah Polley d’après le roman Ce qu’elles disent de Miriam Toews (2018) ; ph : Luc Montpellier ; mont : Roslyn Kalloo ; mu : Hildur Guðnadóttir ; déc : Peter Cosco. Int : Rooney Mara, Claire Foy, Jessie Buckley, Frances McDormand, Ben Whishaw, Judith Ivey, Sheila McCarthy, August Winter (USA, 2022, 104 mn).



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