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Alma viva (2022)
de Cristèle Alves Meira
publié le mercredi 12 avril 2023

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection de la Semaine de la critique au Festival de Cannes 2022

Sortie le mercredi 12 avril 2023


 


Par sa puissance à la fois artistique et technique, le premier long métrage de fiction (après deux documentaires et plusieurs courts-métrages) de Cristèle Alves Meira étonnera, enchantera et marquera le cinéma portugais. Présenté l’année dernière à la Semaine de la critique cannoise, Alma Viva est passé dans plusieurs festivals depuis, où il a, à chaque fois, fait son effet. Parce que, à une époque réputée matérialiste où le néolibéralisme semble triompher partout, ce film revient sur la part secrète - la part maudite selon Georges Bataille -, de l’homme, celle de la mort, des ténèbres, de la magie et de la superstition. Oscillant sans cesse entre l’observation quasi ethnologique et l’attention pour la sorcellerie et les croyances populaires, le film, tendre et cruel, traite des relations familiales entre la France et le Portugal.


 


 

Venue passer l’été auprès de sa grand-mère adorée, Salomé va assister à sa mort à la fois inattendue et étrange - a-t-elle été empoisonnée ou ensorcelée ? Tout le film se passe dans une sorte de semi-pénombre, dans le flou généré par un été torride, dans le village au nord-est du Portugal où habitait la propre mère de la réalisatrice. Ici, celle-ci revient sur un souvenir d’enfance, le sentiment d’injustice ressenti à la mort de sa grand-mère, lorsqu’elle a vu ses oncles et tantes se déchirer autour de sa dépouille pour l’héritage et refuser de payer sa pierre tombale - elle est restée sans sépulture pendant deux ans.


 


 

Mais dans Alma viva, son attention s’est focalisée sur la relation d’une grand-mère avec sa petite-fille. Relation très bien rendue, qui fonctionne à la fois lorsque la grand-mère est encore en vie et lorsqu’elle est décédée, lors des rituels de sorcellerie pour savoir quoi faire de son corps qui commence à puer, et dans l’attente d’un des fils qui ne viendra jamais.


 


 

Outre l’observation à la loupe d’une famille traditionnelle, le film raconte les traditions de magie et de sorcellerie pratiquées dans ces régions retirées des montagnes portugaises depuis des siècles, sous la dictature de Salazar et encore aujourd’hui.


 


 

Cristèle Alves Meira se penche sur ce phénomène, qui touche en majorité les femmes - sans doute manière pour elles d’exercer sur les autres un pouvoir que la société leur refuse. On ne brûle plus les sorcières, certes, mais elles sont toujours l’objet d’une vindicte populaire comme celle qui se manifeste lors de la lapidation, durant l’enterrement de la grand-mère, des personnes qui s’accusent mutuellement des pires méfaits.


 


 

Magnifiquement éclairé et photographié par Rui Poças, le film est remarquable par l’interprétation magistrale des acteurs, professionnels ou non, qui donnent vie à ces personnages - mention particulière à la petite Lua Michel qui interprète Salomé.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe


Alma viva. Réal, sc : Cristèle Alves Meira ; sc : Laurent Lunetta ; ph : Rui Poças ; mont : Pierre Deschamps ; mu : Amine Bouhafa. Int : Lua Michel, Ana Padrao, Jacqueline Corado, Ester Catalao (France-Portugal, 2022, 88 mn).



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