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Amel & les fauves (2021)
de Mehdi Hmili
publié le mercredi 26 avril 2023

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle en compétition du Festival de Locarno 2021

Sortie le mercredi 26 avril 2023


 


Après Thala mon amour en 2016, ce second long métrage dérangeant de Mehdi Hmili, sur le malheur d’une famille, dans la Tunisie post-révolution du Jasmin en 2011, pourrait bien être autobiographique. Comme le héros du film, Moumen, interprété par un jeune acteur non-professionnel, Zeineb Sawen, l’auteur a été footballeur et la mère du film, la superbe actrice Afef Ben Mahmoud, a, comme la propre mère du réalisateur, été condamnée pour adultère et traitée de prostituée.


 


 


 

Il y a beaucoup de Pier Paolo Pasolini dans ce film qui commence comme une belle histoire de famille, dans la Tunisie d’après Ben Ali. Amel, la mère, adore son fils, manière d’oublier ses mauvaises relations avec son mari alcoolique. Elle travaille dans une usine de vêtements, elle est même représentante syndicale et son mari chef des chauffeurs, mais ils vivent très chichement dans un appartement insalubre peuplé de souris. Pour que son fils soit engagé dans une équipe de football prestigieuse, elle accepte de rencontrer l’ami du patron qui va tenter d’abuser d’elle dans sa voiture. Elle sera condamnée à six mois de prison seulement, car son mari n’a pas porté plainte pour adultère, alors que l’homme, riche et puissant, ne récoltera qu’une amende.


 


 

Le jeune Moumen, livré à lui-même, écrasé de honte, sera amené à se prostituer et vivre parmi les travestis du swinging Tunis. Aucune joie dans ce monde de la nuit que la mère rejoindra à son tour, nolens volens, à sa sortie de prison, parce que c’est la seule issue possible dans un pays ruiné par le terrorisme et la corruption.


 


 

Éclairé et photographié par Ikbal Arafat, Amel & les fauves se recommande, selon le réalisateur lui-même, de Maurice Pialat, mais on y découvre aussi l’influence de Abdellatif Kechiche (c’est son épouse, Ghalia Lacroix, qui assure le montage) et celle de John Cassavetes - Streams, le titre international du film, n’est-il pas un hommage à son Love Streams de 1984 ?


 


 

Lorsque Amel, au moment de monter pour la seconde fois dans la voiture d’un homme, regarde frontalement la caméra, c’est une adresse directe à la société tunisienne, une manière de lui dire : "Regarde ton œuvre". Ce regard caméra renvoie à sa réalité cette société patriarcale, hypocrite et violente.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe


Amel & les fauves (Streams). Réal, sc : Mehdi Hmili ; ph : Ikbal Arafat ; mont : Ghalia Lacroix & Hafedh Laridhi ; mu : Amine Bouhafa. Int : Afef Ben Mahmoud, Zeineb Sawen, Iheb Bouyahia, Sarah Hanachi (France-Tunisie, 2021, 122 mn).



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