home > Livres & périodiques > Livres > Méjean, Jean-Max (livre)
Méjean, Jean-Max (livre)
L’Atalante de Jean Vigo (2017)
publié le vendredi 1er mai 2020

À propos d’une nouvelle collection
par Lucien Logette
Jeune Cinéma n°385-386, février 2018

Dominique Delouche, Madame de… de Max Ophuls, Gremese, 2017.

Jean-Max Méjean, L’Atalante de Jean Vigo, Gremese, 2017.


 


Les collections de monographies sur des films n’étaient plus chose très courante ici - qu’est devenue "La petite collection" des Cahiers du cinéma qui publia jadis quelques études pertinentes ? -, à la différence de nos voisins belges (chez Yellow now) ou britanniques (l’excellente BFI Film Classics).
Il est vrai que la revue L’Avant-Scène Cinéma, heureusement relancée, occupe de nouveau brillamment le terrain. La nouvelle collection lancée par l’éditeur romain Gremese, en deux versions, italienne ("I migliori film della nostra vita") et française, prend un chemin un peu différent : à la place du découpage dialogué, une description séquence par séquence, appuyée sur de nombreuses photos complétées de commentaires et d’analyses. Le format est pratique (celui des collections de poche, type "128" de chez Armand Colin), la maquette plaisante - papier glacé, typographie claire, photos bien utilisées -, le prix accessible.

L’intitulé de la collection laisse entendre qu’il ne s’agit pas d’explorer les bas-côtés de l’histoire du cinéma - on n’est pas près d’y trouver Remous de Edmond T. Gréville (1935), ou Les 5000 Doigts du Dr. T de Roy Rowland 1953) -, ce qui est un tort, car les meilleurs films de nos vies ne sont pas forcément ceux qui tiennent la plus haute place dans le panthéon officiel. Mais il faut faire avec.

Quatre titres ont déjà été publiés, les deux indiqués ici + L’Aurore (Sunrise) de Friedrich Wilhelm Murnau (1927), et La Porte du paradis (Heaven’s Gate) de Michael Cimino (1980). Et une vingtaine d’autres est annoncée, parmi laquelle nombre de chefs-d’œuvre certifiés, avec deux curiosités bienvenues, le film de Mario Camerini, Les Hommes, quels mufles ! (Gli Uomini, che mascalzoni..., 1952), et Zoo (A Zed and Two Noughts) de Peter Greenaway (1985), traités pour la plupart par des auteurs transalpins - avec quelques exceptions françaises dont on se réjouit.

Ce n’est pas parce que les études sur les films de Max Ophuls et de Jean Vigo sont dues à un rédacteur de la revue et à un ami de la maison qu’on n’en dira pas de mal, mais tout simplement parce qu’il n’est guère possible d’en dire. L’un et l’autre étant des spécialistes et des amateurs (au sens premier) dont l’approche est similaire - pas à pas minutieux, minutage de chaque séquence, analyse des images, explication des marges et du hors cadre, références à la carrière de chaque réalisateur lorsqu’elles peuvent étayer l’information, etc. -, on se trouve là devant des objets indiscutables, dans le sens où il s’agit d’usuels auxquels recourir en cas de panne mémorielle ou pour vérifier l’état de nos souvenirs. Le reste est fonction de notre propre rapport au film abordé.

Si L’Atalante nous émeut, c’est parce que les photos de Dita Parlo sont magnifiques (le rire de la page 45, entre dix exemples) et qu’elle nous renvoient à notre premier éblouissement devant un film dont les copies étaient pourtant loin d’avoir la qualité d’aujourd’hui.

Quant à Madame de…, si le film nous touche différemment, c’est parce qu’il nous a fallu grandir, passer d’une première vision ennuyée devant une histoire de grands bourgeois guindés dont on se souciait peu à la perception de la palpitation profonde des images et de la charge vibratoire de cet amour scandaleux.
D’un côté une évidence, de l’autre un parcours intérieur. Mais l’un et l’autre font effectivement partie de nos "meilleurs films…" et l’on est heureux de ranger leurs apologies sur nos proches rayons. On attend la suite immédiate avec intérêt - Federico Fellini, Elia Kazan, Stanley Kubrick, Jean-Pierre Melville : aucun auteur de chevet mais s’il y a quelqu’un à qui Le Deuxième Souffle a changé la vie, pourquoi pas ?

Lucien Logette
Jeune Cinéma n°385-386, février 2018


* Dominique Delouche, Madame de… de Max Ophuls, collection Les meilleurs films de notre vie, Gremese, 2017, 128 p.

* Jean-Max Méjean, L’Atalante de Jean Vigo, collection Les meilleurs films de notre vie, Gremese, 2017, 120 p.



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts