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Amour et les forêts (l’) (2023)
de Valérie Donzelli
publié le mercredi 24 mai 2023

par René Prédal
Jeune Cinéma n°423, été 2023

Sélection officielle Cannes Première du Festival de Cannes 2023

Sortie le mercredi 24 mai 2023


 


En 2014, Éric Reinhardt loupe de peu le Goncourt avec L’Amour et les forêts, devenu un best-seller. Ce roman d’un infernal harcèlement conjugal qui finit très mal est une fiction créée par l’auteur, à partir de nombreux récits que lui ont fait des femmes bien réelles ayant été victimes de l’emprise maléfique d’un violent possessif dangereux. L’auteur choisit la forme d’une mise en abyme, puisque son livre met en scène un narrateur racontant l’histoire hachée que lui confie Bénédicte Ombredanne lors de plusieurs rencontres et dans des mails.


 


 

Avec sa co-adaptatrice Audrey Diwan, - scénariste, et réalisatrice de L’Événement (2021), d’après le roman de Annie Ernaux -, Valérie Donzelli conserve un effet un peu analogue de distanciation, en faisant raconter sa vie à l’imparfait par l’épouse elle-même, Blanche (Virginie Efira), ainsi constamment à l’image, le narrateur du roman étant remplacé par une douce femme âgée (Dominique Reymond), qui l’écoute quasiment sans parler et dont on apprendra seulement à la toute fin qu’elle est l’avocate de son divorce. D’entrée, le spectateur sait donc qu’elle s’en est sortie, certes profondément abimée, mais vivante et debout, ce qui, évidemment, change tout.


 

Le début de son histoire ressemble à la caricature d’un conte de fées en hommage super appuyé aux Demoiselles de Rochefort (1967), car Blanche a une sœur jumelle Rose, son beau séducteur se nomme Lamoureux et le couple chante son idylle pendant deux minutes, comme dans la comédie musicale de Jacques Demy. Mais le scénario ne fera absolument rien des potentialités de cette gémellité (réduite à une banale sororité).


 


 

Par contre, si Valérie Donzelli parvient mal à montrer comment Grégoire et Blanche ont basculé dans l’horreur par le seul passage de Caen à Metz, l’épouvante des nuits sans sommeil où Blanche est littéralement étouffée dans le huis clos toxique où se déchaîne son monstre tyrannique (remarquable prestation de Melvil Poupaud) constitue le cœur terrible d’un angoissant morceau de cinéma qui ébranle fortement le spectateur.


 


 

Quant aux forêts, elles recèlent une légère bouffée d’amour (un peu gnangnan avec son lavage de cheveux) qui précipite malheureusement l’époux dans un paroxysme de méchanceté encore plus démoniaque. Un film inégal mais assez fort.

René Prédal
Jeune Cinéma n°423, été 2023


L’Amour et les forêts. Réal : Valérie Donzelli ; sc : V.D. & Audrey Diwan, d’après le roman d’Éric Reinhardt (2014) ; ph : Laurent Tangy ; mont : Pauline Gaillard ; mu : Gabriel Yared. Int : Virginie Efira, Melvil Poupaud, Dominique Reymond, Romane Bohringer, Virginie Ledoyen, Marie Rivière, Laurence Côte, Nathalie Richard (France, 2023, 105 mn).



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