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Gang des Bois du temple (le) (2022)
de Rabah Ameur-Zaïmeche
publié le mercredi 6 septembre 2023

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection Forum de la Berlinale 2023

Sortie le mercredi 6 septembre 2023


 


Pour son septième long métrage, et vingt ans après Wesh Wesh qu’est-ce qui se passe ? (2001), qui l’avait fait connaître en 2002, Rabah Ameur-Zaïmeche revient en force avec ce thriller étonnant construit comme une tragédie. Avec peu de paroles, mais une intensité dans les regards et la musique - notamment, la prestation superbe de la chanteuse Annkrist lors de la cérémonie des obsèques au début du film dans l’église moderne de la Trinité à Bordeaux où il a été tourné -, le film nous apparaît comme un hommage reconnu aux polars des années 60 et 70 dont le cinéaste se nourrissait par la télévision lors de sa jeunesse.


 


 


 

C’est surtout un hommage reconnu et appuyé au Samourai de Jean-Pierre Melville (1967) à travers l’ambiance nocturne et la similitude entre le personnage principal incarné par Alain Delon et celui de monsieur Pons dans le film, interprété par un excellent Régis Laroche.


 


 

Toutefois, et Rabah Ameur-Zaïmeche le reconnaît lui-même, les films de Jean-Pierre Melville ne comportent aucune analyse de la condition sociale des personnages, et c’est cet aspect que lui veut privilégier depuis le début. "Mes personnages apparaissent pleinement comme des enfants des quartiers populaires, ils sont totalement incorporés dans les rapports de classe". On l’aura compris, si on focalise son attention sur le scénario, ce qui passionne le réalisateur depuis toujours, c’est la peinture d’une société et de ses banlieues, ses "cités" comme on dit maintenant, et les mutations de la conscience de classe.


 


 

Le Gang des Bois du temple s’inspire d’un fait divers de 2014 lors duquel une bande lourdement armée avait dépouillé sur l’autoroute A1 au niveau de Porte de la Chapelle le van noir d’un riche prince arabe. Mais le scénario va plus loin encore en imaginant la vengeance de ce riche Arabe pour montrer qu’actuellement, "il vaut mieux être un Arabe riche, qu’un Arabe pauvre".


 


 


 

En effet, dans la droite ligne de ses films précédents - et surtout Histoire de Judas en 2015 dont on retrouve de nombreux éléments ici -, pour lui, le cinéma doit être un instrument de lutte. En l’occurence, Rabah Ameur-Zaïmeche parvient à harmoniser une recherche esthétique et formelle parfaitement réussie et la description d’une société pour faire de ce dernier film à la fois un hommage au film noir et au cinéma engagé. D’où sans doute cette fin magnifique qu’on ne dévoilera pas mais qui semble ouvrir la porte à une interprétation humaniste, comme si monsieur Pons, ancien militaire, voulait rendre hommage à sa mère décédée au début du film et qui fut comme une mamie gâteau de la cité pour ces tous ces enfants devenus, en raison de la misère et de l’exclusion, des truands occasionnels réunis par le gang.


 


 

Magnifiquement éclairé par Pierre-Hubert Martin et monté par Grégoire Pontecaille, le film dégage une certaine magie qui le rend inoubliable. "Contrairement aux oligarchies avides de pouvoir et d’argent qui nous terrifient en fomentant des guerres, des famines et les pires des atrocités, ce prolétariat rêve toujours d’une vie paisible et fraternelle. Les gens ont des vies simples, des aspirations simples", déclare le réalisateur.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe


Le Gang des Bois du temple. Réal, sc : Rabah Ameur-Zaimeche ; ph : Pierre-Hubert Martin ; mont : Grégoire Pontécaille ; mu : Annkrist et Sofiane Saïdi ; déc : Mohamed Aroussi ; cost : Julia Fouroux. Int : Régis Laroche, Philippe Petit, Marie Loustalot, Kenji Meunier, Slimane Dazi, Annkrist (France, 2022, 95 mn).



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