Ce long métrage, lauréat du Prix Un certain regard à Cannes 2023, s’inscrit déjà dans une assez longue série de films traitant de sexualité débridée au sein d’un groupe d’étudiants en vacances dans des lieux festifs, tels Shortbus de John Cameron Mitchell (2006), Spring Breakers de Harmony Korine (2013), ou, en moins trash, Virgin Suicides de Sofia Coppola (1999).

Pour son premier film, la jeune directrice de la photographie, diplômée de la NFTS en 2019, frappe fort pour dénoncer cette sexualité à base de mercantilisme, imposée de plus en plus aux filles. Question de mode, d’influence des réseaux sociaux, de plus en plus de jeunes, surtout bien sûr des filles, souffrent de viols ou de violences, exercés presque impunément en raison de la sacro-sainte libération des mœurs. Ce genre de films met très mal à l’aise, d’autant que How to Have Sex ne pose aucun jugement moral et laisse le public face à ses propres limites, notamment dans des scènes crues à la sexualité à peine simulée.

On suit comme des voyeurs impuissants le parcours de jeunes filles se rendant pour des vacances chaudes dans une île paradisiaque, où la sexualité semble à la portée de toutes les bourses et de tous les physiques. À peine sorties de l’enfance, ces lycéennes arrivent dans ces cercles du plaisir avec une sorte d’excitation surjouée, une dose de séduction basée sur le style de lolitas hypersexuées et vulgaires, sans se rendre compte qu’il s’agit d’un piège, forcées nolens volens à entrer dans le moule du plaisir sexuel obligatoire.

C’est ce qu’il arrive à la jeune Tara, un soir qu’elle a bu plus que de raison. Le film raconte ses tourments, ses rancœurs et comment elle tente de se sortir de cette violence subie, une sorte de résilience ne manqueront pas d’observer certains. Sans forcer le trait, et sans prêchi-prêcha, Molly Manning Walker fait réfléchir le spectateur. Elle raconte d’ailleurs que certaines projections ont été suivies de débats mais que les acteurs masculins ont préféré ne pas y pas y participer, sans doute parce qu’ils se projetaient dans l’attitude machiste des personnages du film…

Les jeunes acteurs sont tous particulièrement bien choisis, à commencer, dans le rôle de Tara, par la révélation Mia McKenna-Bruce, repérée dans la série américaine Vampire Academy (2022), mais aussi Shaun Thomas et Lara Peake, de la série britannique Mood (2022). Bien que directrice de la photo, la réalisatrice a confié l’image à Nicolas Canniccioni.

La musique de James Jacob et le casting par Isabella Odoffin offrent un résultat marquant, qui donne corps à son souvenir d’adolescence, entre terreur et fascination :"Lors d’un mariage à Ibiza, j’ai retrouvé pas mal d’amis de jeunesse et nous nous sommes souvenus de nos premières vacances sur cette île, notamment d’une histoire de fellation en public sur une scène. Nous nous sommes rendu compte de l’impact que cela avait eu sur les ados que nous étions. Je n’avais pas pris conscience que ces événements avaient eu une telle incidence sur ma vie sexuelle, mais aussi sur celle de toutes les filles à qui j’ai parlé pendant ce mariage".

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

How to Have Sex. Real, sc : Molly Manning Walker ; ph : Nicolas Canniccioni ; mont : Fin Oates ; mu : James Jacob ; cost : George Buxton. Int : Mia McKenna-Bruce, Samuel Bottomley, Lara Peake, Shaun Thomas (Grande-Bretagne-Grèce, 2023, 88 mn).