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Jeu de la Reine (le) (2023)
de Karim Ainouz
publié le mercredi 27 mars 2024

par Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma n°423, été 2023

Sélection officielle en compétition du Festival de Cannes 2023

Sortie le mercredi 27 mars 2024


 


Tout le monde connaît plus ou moins la vie privée de Henry VIII, ne serait-ce que grâce aux innombrables films qui ont raconté sa vie, dès 1905 et jusqu’à nos jours. On se souvient même de certains acteurs qui l’ont incarné, Emil Jannings, Charles Laughton, ou Richard Burton. Karim Ainouz a choisi d’adapter le premier roman de de Elizabeth Fremantle, Queen’s Gambit (2013). On sait que le gambit, aux Échecs, c’est le sacrifice stratégique volontaire d’un pion. Son roi, Henry VIII, c’est Jude Law, et sa reine, Katherine Parr (Alicia Vikander), la moins connue de ses femmes, celle qui survit.


 


 

Été 1544, la Réforme couve en Angleterre. Katherine Parr, après liquidation des précédentes, assure la régence d’Angleterre et d’Irlande pendant qu’il guerroie en France. Elle s’acquite bien de son rôle, soutenue par des conseillers de la vaste famille, face aux diverses conspirations, et alors que la nouvelle religion se répand avec sa mise en cause du despotisme. Quand le roi rentre, atteint d’ulcères variqueux aux jambes et des troubles paranoïdes des guerriers, une grande amie à elle, Anne Askew, est envoyée au bûcher pour son engagement hérétique et Katherine se trouve compromise.


 


 

La frontière est mince entre son statut de reine et son élimination. Le roi peut soit consacrer ses dernières forces à soutenir l’ambition des conservateurs et condamner la reine, soit choisir de lui maintenir une confiance personnelle qu’elle n’a pas trahie. Elle évalue chaque jour le risque d’un basculement de l’arbitrage royal vers sa mise à mort, dans un doute angoissant dont sa persévérance à assurer son rôle d’épouse constitue le meilleur rempart.


 


 

Dans les films historiques, la modernité du sujet peut être diversement située. On montre rarement, comme au théâtre, Jésus en jeans ou Robespierre en costard. Dans ce film, les costumes et les décors des Tudor, s’ils sont soignés, passent mal et apparaissent comme archaïques et encombrants.


 


 

La lecture féministe et la continuité de l’Histoire, Karim Ainouz préfère les faire passer par l’intimité d’une relation entre deux êtres, volatile mais préservée au fond des cœurs, notamment celui du des mourant. Face à Jude Law à la démarche gangrénée, Alicia Vikander est silencieuse et attentive. C’est elle la gagnante.

Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma n°423, été 2023


Le Jeu de la Reine (Firebrand). Réal : Karim Aïnouz ; sc : Jessica Ashworth & Henrietta Ashworth ; ph : Hélène Louvart ; mont : Heike Parplies ; mu : Dickon Hinchliffe. Int : Alicia Vikander, Jude Law, Sam Riley, Eddie Marsan, Simon Russell Beale, Erin Doherty, Ruby Bentall (Grande Bretagne, 2023, 120 mn).



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