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Spartacus & Cassandra (2014)
de Ioanis Nuguet
publié le jeudi 19 mars 2015

par Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection ACID à Cannes 2014

Sortie le mercredi 11 février 2015

Depuis sa présentation à Cannes en 2014, dans le cadre de la programmation de l’ACID, Spartacus et Cassandra collectionne les récompenses : Louve d’or au festival de Montréal, prix FIPRESCI à Leipzig, distinctions aux festivals de Rome et de Florence.
Le film a également fait le plein de médailles du côté des juniors (Prix du Grain à démoudre, Prix des Collégiens).
Le premier long métrage du jeune réalisateur Ioanis Nuguet a, en outre, reçu un excellent accueil de la critique.
Tout cela lui a permis d’être visible dans près de cent salles de l’hexagone.

Ce succès, mérité, est dû sans doute, en premier lieu, à son titre qui convoque la mythologie, la tragédie, les luttes héroïques et donne une dimension légendaire aux deux pré-adolescents roms qui sont les protagonistes d’une histoire où ils conservent leur vrai prénom.

Il s’explique également par le choix du thème : l’indignation soulevée par une longue série d’expulsions justifiées par les discours martiaux de nos politiques, toutes couleurs confondues.

Le film aborde la réalité des squats et des campements illicites en Seine-Saint-Denis, des évacuations, de la pratique millénaire de la mendicité, etc.
Sans souci de précision documentaire, sans aucune forme d’explication, sans le besoin de convaincre. Ces faits se présentent comme un conte, que Nuguet nous narre en se situant à "hauteur des yeux des enfants".

Ses Hänsel et Gretel, perdus dans la jungle des villes, confrontés aux services sociaux, au juge, à l’école et même à un bonne fée, une trapéziste qui les héberge sous son chapiteau, sommés de choisir la vie qu’ils voudraient mener.

Les héros ont trouvé refuge dans le monde du cirque, du risque, de la prouesse, du spectacle. Ils aiment se mettre en scène, marcher sur la corde raide, danser et, par-dessus tout, jouer avec les mots et avec les sons de la langue d’adoption. La caméra se met aussi à chalouper, le montage alterne les scènes courtes, disjointes et fugitives comme des moments de bonheur, et laisse filer des plans-séquences où la parole est d’importance, poétique et rageuse.

Les slams de Spartacus et la chanson de Cassandra sont allègres puis deviennent déchirants dans les "scènes" avec les parents.
Bouleversants portraits d’enfants, a-t-on dit. C’est vrai. Mais quels parents !
Un colosse de père, terrassé par l’alcool, épuisé à force de dormir dehors, pitoyable. Et son épouse qui a perdu la raison, belle comme une Pythie avec ses grands yeux verts fous. Un visage droit sorti d’une mosaïque antique. Au terme d’une succession d’épreuves initiatiques, les enfants accepteront de se couper de leurs parents. L’assimilation, donc, mais à quel prix !

Depuis La Gitanilla de Cervantès, le thème du Bohémien ravisseur d’enfants hante la fiction. Il a été exploité dès les débuts du cinéma avec Volée par les Bohémiens (1904) d’Alice Guy, puis par Le Miracle de Noël (1909), une production Éclair.

Spartacus et Cassandra renverse ce cliché.
L’État-providence retire aux parents irresponsables leur progéniture. Avec bonne conscience.
Heureusement, il se trouve une saltimbanque pour ménager le happy end !

Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe (mercredi 18 mars 2015)

Spartacus & Cassandra. Réal : Ioanis Nuguet ; sc : .N. & Samuel Luret (France, 2015, 81 mn). Documentaire.

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