Sur un pragmatique "On ne peut vivre seul, on ne peut vivre ensemble", s’enclenche et se termine le film. On n’est pas sûr que la phrase soit énoncée. Elle est pourtant là, dans tous les regards, dans toutes les remarques. Le surmédiatisé Jackie Berroyer traîne sa triste carcasse de chez lui, où l’attend sa pimpante épouse, Valeria Bruni Tedeschi, à des lieux "enchanteurs" ( ?) où l’attendent tantôt la très jeune Hélène Fillières ou Natacha Régnier, l’une se faisant passer pour l’autre pour mieux draguer le professeur.

Jackie Berroyer joue le rôle d’un professeur en crise, en quête de jeunesses féminines enclines à jouer avec lui à des jeux "très intellectuels" du genre "s’il prend la tarte aux framboises, laquelle prendras-tu ?", etc., pour extorquer un baiser qu’il ne s’empresse même plus d’encaisser, car il sait qu’il ne l’a pas tellement mérité. On n’aurait pas donné un centime à ce film nombrilique, penché sur les états d’âme d’un triste homme de 50 ans ne racontant plus rien que ses rengaines de petit vieux plus très séduisant.

Mais toutes ces belles ne peuvent se passer de lui et il finira par se raccommoder avec la première. Seule scène intéressante : il a entraîné son épouse au bord de la mer (qu’elle déteste), se promène donc seul et rencontre un jeune assis dans les rochers, l’épatant Fabrice Desplechin, avec qui il noue conversation. Alors, là, c’est drôle, surprenant, et on entrevoit ce que le film aurait pu être s’il avait eu le courage de la férocité dans son propos.

Heike Hurst
Jeune Cinéma n°238, été 1996

Encore. Réal, sc : Pascal Bonitzer ; ph : Emmanuel Machuel ; mont : Suzanne Koch. Int : Jackie Berroyer, Valeria Bruni-Tedeschi, Natacha Régnier, Hélène Fillières, Laurence Côte, Louis-Do de Lencquesaing, Fabrice Desplechin, Eva Ionesco Élisabeth Kaza Pascal Bonitzer Lou Castel (France, 1996, 96 mn).