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Sapienza (la) (2014)
de Eugène Green
publié le mercredi 25 mars 2015

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection au festival de Toronto 2014
Sélection au festival de Locarno 2014

Sortie le mercredi 25 mars 2015


 


Dès les premiers plans, le nouveau film de Eugène Green (1) enchante par la beauté de sa lumière et la justesse de son cadre. Dès les premiers plans, le style est à l’œuvre : lenteur des mouvements de caméra, rigueur du cadrage, un esprit de perfection mêlé à un extrême souci de la beauté.

La Sapienza, tourné à Stresa sur les rives du lac Majeur, évoque la rencontre croisée entre deux couples, un architecte et sa femme, et un homme et sa sœur, sur fond d’architecture baroque de Francesco Borromini.


 

L’objectif de Green est de faire sourdre l’invisible entre les êtres, naître une émotion entre individus qui n’étaient pas censés se connaître et qui pourtant vont se rencontrer et ne plus se quitter.
Au cours du récit, les personnages se libèrent et forment deux nouveaux couples père-fils et mère-fille, l’un et l’autre échangeant connaissances, réflexions, présence et chaleur.
Le dialogue, comme toujours très étudié chez Green, joue sur la particularité des timbres, le rythme d’élocution, la voix légèrement décalée par rapport à l’action, l’intonation indifférente ou distante. Les propos sont raisonnables, intelligents, énoncés clairement par une diction appuyée sur les syllabes des mots, les visages extrêmement présents et attentifs.

D’un côté, il y a l’architecture, le Grand Art et de l’autre l’humain, plus fragile, plus délicat, pris en compte par l’épouse de l’architecte.
Ce qui s’installe et se renforce à chaque plan de façon prodigieuse, c’est un sentiment d’empathie pour les personnages. Comme s’ils étaient ancrés dans la réalité de telle sorte que leurs interrogations soudain nous concernent, que l’émotion qui s’éveille en chacun s’exprime au-delà de la retenue et de la réserve, et laisse le champ libre aux comportements nouveaux, écoute et générosité, sans fausse pudeur.

Quelque chose de l’ordre du miracle advient.
D’un style formellement très construit, de personnages assez déterminés et contraints dans leur rôle, surgit une capacité émotionnelle rare, un débordement des sens et un charme réellement imprévu.
Autre caractéristique du cinéma d’Eugène Green, la captation de la lumière, quasi impressionniste, par touches frémissantes et radieuses sur les visages éblouis d’acteurs transcendés par la mystique et l’art.

La Sapienza, un voyage intérieur vers l’architecture et la lumière, vécu et commenté par Christelle Prot Landman et Fabrizio Rongione. Et la lumière fut !

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma en ligne directe (mercredi 25 mars 2015)

1. Toutes les nuits (2001)  ; Le Monde vivant (2003) ; Le Pont des Arts (2004) ; La Religieuse portugaise (2009).

La Sapienza. Réal, sc : Eugène Green ; ph : Raphaël O’Byrne ; mont : Valérie Loiseleux. Int : Fabrizio Rongione, Christelle Prot Landman, Ludovico Succio, Arianna Nastro, Hervé Compagne (France-Italie, 2014, 104 mn).



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