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Dissidente (2022)
de Pier-Philippe Chevigny
publié le mercredi 5 juin 2024

par Lucien Logette
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle du Festival du film de Tribeca 2023

Sortie le mercredi 5 juin 2024


 


Il s’agit du premier long métrage de Pier-Philippe Chevigny, réalisateur québécois inconnu par chez nous. Le film a mis quelque temps à nous parvenir, malgré ses présentations dans divers festivals, Tribeca et Karlovy-Vary, en 2023, sous son titre original de Richelieu. Le cinéaste développe "un intérêt pour les enjeux socio-politiques et la justice sociale". On ne saurait mieux dire, tant son inspiration et son scénario sont exemplaires, entre Ken Loach et les Frères Dardenne.


 


 

Dans son parfait cynisme capitaliste, le Canada s’est doté dans les années 1980 d’un programme, le PTET (Programme des travailleurs étrangers temporaires) qui permet aux employeurs d’aller piocher à la source pour embaucher des ouvriers saisonniers.


 


 

Le titre Richelieu était un plan général - c’est le nom du village perdu du Québec où se déroule l’action -, alors que Dissidente est un plan rapproché, qui met l’accent sur l’héroïne, traductrice hispanisante nouvellement désignée par les dirigeants de l’usine agroalimentaire du coin pour servir de liaison avec des employés guatémaltèques recrutés directement au pays. Leur exploitation dans des conditions honteuses la conduit à mener, pour les défendre, un combat dont on devine dès l’abord qu’il restera douteux, tel celui jadis décrit par John Steinbeck. Nous sommes bien là dans la lignée des pères fondateurs du cinéma d’intervention.


 


 

Mais jamais le film ne verse dans le démonstratif : le patron local, esclave du rendement imposé par les dirigeants lointains, est un salaud (en terme sartrien) au comportement tristement compréhensible, la défenseuse maladroite accumule les erreurs tactiques qui retombent sur les immigrés. Rien de manichéen. Visuellement, c’est du cinéma un peu triste, à la mesure du paysage social et géographique, il y a parfois un excès de travellings agités à la "Rosetta" - mais tout est adapté à la dynamique du récit. Et les personnages principaux sont honnêtement décrits, sans animosité ni bienveillance. On pourrait lui reprocher un certain manque d’ampleur - mais le but de l’auteur n’était manifestement pas de faire un "beau grand film", mais un film qui nous éveille justement. Mission accomplie.

Lucien Logette
Jeune Cinéma en ligne directe


Dissidente (Richelieu) aka Temporaires. Réal, sc : Pier-Philippe Chevigny ; ph : Gabriel Brault Tardif ; mont : Amélie Labrèche ; mu : Felicia Atkinson. Int : Ariane Castellanos, Marc-André Grondin, Nelson Coronado, Eve DUranceau, Gerardo Mirande (Canada, 2022, 90 mn).



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