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Lacassin, Francis (1931-2008)
Une vie, une œuvre
publié le vendredi 5 septembre 2008

par Bernard Chardère
Jeune Cinéma 319-320, automne 2008

Francis Lacassin (1931-2008)

Lorsque je serai mort, il faudra qu’on dise de moi : "Celui-là n’ a appartenu à aucune école, à aucune église, à aucune institution, à aucune académie, surtout à aucun régime si ce n’est le régime de la liberté".
Gustave Courbet au ministre des Arts, 1870

2008, une génération commence à se fissurer.
Lacassin depuis le 12, Demeure le 18, Esnault le 29 août 2008, trois passionnés : tous sont en vacances d’été. Absents, partis sans laisser d’adresse. Ne cherchons pas : ils sont au premier rang dans la salle obscure, où le cinéma est permanent.


Nous nous rencontrâmes, Francis Lacassin et moi, à l’est d’Alès (où il naquit en 1931), uniformément vêtus et sentant le sable réchauffé.
Déjà, il ne rêvait que de redonner vie à des textes introuvables, de faire reconnaître des auteurs méconnus, de parler de Simenon avec Narcejac et de Judex avec Franju.

Il vint à Lyon pour les premiers pas des "Films du Galion", réalisant avec Raymond Bellour, sur une douzaine de courts métrages, Mon ami Mandrin (1960).
Nous projetions des copies FLAM de Fescourt et cherchions en Ardèche des villages oubliés…

Il prépara des émissions de télévision avec Michel Subiela ; avec Alain Resnais, posa les jalons d’une science aux allures de fiction, celle des bandes dessinées, qu’il portera jusqu’en Sorbonne.
Sans avoir rien du diplômé classique : défricheur de sentiers, plutôt, explorateur de l’imaginaire, la plume à la main. "J’ai écrit plus de 500 préfaces, assurait-il. Je suis aussi champion de billard, sans boules : avec scalpel". Cet homme jovial mais de santé fragile, discret, voire secret, aimait avant tout le travail de recherche. Il pouvait commencer dans sa bibliothèque : 35 000 volumes.

Pour assouvir sa passion, il lui fallait séduire des éditeurs : ce furent Jean-Jacques Pauvert (Tarzan), Éric Losfeld (Clouzot), Christian Bourgois et Guy Schoeller surtout, qui en "10 x 18" puis pour "Bouquins", lui permettront d’éditer Jack London, Casanova et bien d’autres. Son dernier titre : un "inattendu" Alexandre Dumas.

Avec les films comme avec les livres, il voulait sortir des sentiers rebattus pour étudier minutieusement Alfred Machin, Jean Durand, Henri Fescourt ou Louis Feuillade, Joë Hamman ou Musidora.
À d’autres l’Histoire ! Lacassin voulait sa "contre-histoire". Il ne l’a pas achevée, mais garde l’honneur de l’avoir entrepris.

Bernard Chardère
Jeune Cinéma 319-320, automne 2008

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