Laura Luchetti, dont c’est le troisième long métrage (1) s’est "librement inspirée" du récit de Cesare Pavese (2). Elle filme l’histoire de Ginia à Turin et dans les paysages piémontais chers à l’écrivain. La toute jeune fille à la recherche de son identité et de ses désirs, va tourner la page de son adolescence.

Elle a quitté la campagne et travaille dans un atelier de couture où sa créativité est promesse d’avenir. Elle partage un appartement avec son frère Severino qui travaille la nuit et ne parvient ni à étudier, ni à écrire. Il en conçoit mélancolie, ressentiment contre la vie urbaine. La rencontre d’Amelia, une fille libre et délurée, présage la rupture avec son milieu. "Elle n’est pas comme nous", constate son frère. C’est justement ce qui l’attire. En s’identifiant à Amelia qui vit de son activité de modèle et l’emmène dans l’atelier de Guido et de Rodrigues, elle manifeste le désir de poser nue, d’être vue, représentée. Elle cède aux sollicitations de Guido.

La pénombre dans les scènes de l’atelier, où sa désillusion est perceptible, contraste avec les scènes lumineuses et solaires quand elle part en balade avec Amelia. Leur attirance mutuelle paraît au grand jour dans un bal sur les collines, elles dansent et le monde autour d’elles disparaît.

Laura Luchetti, dont le thème de prédilection est l’adolescence, s’émancipe du récit de Cesare Pavese en représentant Ginia comme une jeune fille contemporaine libre d’aimer. La scénographie, les costumes et la lumière créent une atmosphère atemporelle qui s’accorde à la lecture actualisée de la cinéaste, sans renier la période historique qu’elle situe en 1938, ce qui est juste évoqué par des chemises noires sur une corde à linge, une émission de radio vite éteinte.
La bella estate est un joli film sensible, interprété par Yile Yara, actrice dans les films de Alice Rohrwacher et Deva Cassel (fille de Monica Belluci et de Vincent Cassel) qui manque d’intensité.

Claudine Castel
Jeune Cinéma en ligne directe

* Ne pas confondre avec "Le Bel Été" de Pierre Creton (2018), Jeune Cinéma en ligne directe.

1. Après Febbre da fieno (2010), et Fiore Gemello (2018), elle a signé en 2021 la série télévisée Nudes, dont elle prépare la deuxième saison.

2. Cesare Pavese, La bella estate. Tre romanzi, Turin, Einaudi, 1949. Le Bel été. trois romans traduction de Michel Arnaud, Paris, Gallimard, 1955. L’ouvrage contient deux autres récits, Le Diable sur les collines que Vittorio Cottafavi, porta à l’écran en 1985 (Il diavolo sulla collina,) et Femmes entre elles, que Michelangelo Antonioni adapta au cinéma en 1955 (Le amiche.)

La bella estate (Le Bel Été). Réal : Laura Luchetti ; sc : L.L., Greta Scicchitano Mario Iannuzziello & Isabella Weber d’après Cesare Pavese ; ph : Diego Romero ; mont : Simona Paggi ; mu : Francesco Cerasi ; cost : Diamante Cavalli. Int : Yile Yara Vianello, Deva Cassel, Nicolas Maupas, Alessandro Piavani, Adrien Dewitte, Cosima Centurioni, Gabriele Gasco, Andrea Bosca, Anna Bellato (Italie, 2023, 101 mn).