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Rupestres (2024)
de Marc Azéma
publié le mercredi 26 mars 2025

par Francis Guermann
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 26 mars 2025


 


La grotte de La Sagne, dans le Parc Naturel régional des Causses du Quercy, fut longtemps exploitée comme champignonnière. Elle est située non loin de celle, célèbre, du Pech Merle qui se visite et dans laquelle se trouvent des représentations de l’art pariétal (chevaux ponctués, mains négatives). Ce n’est pas le cas de La Sagne, fermée au public, plus modeste, qui ne présente pas d’intérêt particulier sinon ses reliefs et concrétions et, on le suppose, d’avoir été le refuge possible d’hommes du Paléolithique, il y a 25 000 ans.


 


 


 

C’est dans cet endroit qu’une expérience unique a été proposée à sept artistes auteurs de bandes dessinées : produire sur les parois des œuvres individuelles ou collectives en utilisant les techniques manuelles et les éclairages les plus rudimentaires. Le réalisateur Marc Azéma (également archéologue) en filma la conception et la réalisation, au cours des dix journées de l’expérience, au mois de septembre 2022.


 


 


 

Le film suit jour après jour le travail de ces artistes reconnus et ayant une expérience importante dans leur domaine. On assiste à l’évolution de leur démarche et de leur travail : leur arrivée avec leurs a priori, leurs envies et leurs projets, puis la découverte de la grotte, leurs doutes, les adaptations aux contraintes du lieu (reliefs, matières, obscurité, choix des pigments et des outils), les choix figuratifs, les collaborations entre eux, leur volonté d’aboutir à une cohérence finale.


 


 


 

Il est tout à fait intéressant de découvrir ce work in progress. D’abord le lieu est très vite inspirant pour les artistes qui écartent d’emblée l’idée de singer les hommes du Paléolithique dans leurs gestes supposés ou dans les choix de figuration. Ces auteurs ont une approche concrète, ludique et apportent leur expertise artistique. Ils cheminent intuitivement, sans certitude, avec la conscience qu’ils réalisent une œuvre éphémère que le temps va rapidement effacer (il est pour eux peu probable que les circonstances qui ont permis aux peintures rupestres de traverser le temps se reproduisent). On sent chez eux une vraie envie de se confronter au lieu, de l’expérimenter, d’en tirer de nouvelles utilisations, avec leurs propres expériences et avec l’envie de partager leur univers, de s’inscrire dans le monde actuel.


 


 


 

Les parois présentent des reliefs, suggèrent des formes ; l’obscurité est à peine levée par les lueurs des lampes frontales, les lumières vacillent, provoquant cette impression de mouvement qui a pu faire dire, au risque d’énoncer une téléologie, que l’art pariétal pouvait être interprété comme une préhistoire du cinéma (ou de la bande dessinée). On ne peut pas appréhender le résultat final d’un seul regard dans le dédale de la grotte, mais ce qu’on en voit est vraiment remarquable. La caméra en a saisi tous les détails et l’évolution : le film en sera peut-être le seul témoignage, une fois la grotte refermée.

Francis Guermann
Jeune Cinéma en ligne directe


Rupestres. Réal, mont : Marc Azéma ; ph : Maxime Anduze. Avec Chloé Cruchaudet, Edmond Baudoin, Étienne Davodeau, Emmanuel Guibert, David Prudhomme, Pascal Rabaté, Troubs (France, 2024, 90 min). Documentaire.



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