par Laurent Berger-Vachon
Jeune Cinéma en ligne directe
Sélection officielle Séances spéciales du Festival de Cannes 2024
Sortie le mercredi 29 janvier 2025
La rentrée des classes, à qui cela ne dirait pas quelque chose ? À personne - mais pas forcément la même (chose) et pas pour les mêmes raisons. L’école est un univers social où les actes s’entrecroisent. La machine à tisser les éléments est en marche.
Ici, c’est le directeur qui est dans le hall d’accueil des élèves et des parents. Il y a ceux qui franchissent le pas pour la première fois et ceux qui le connaissent déjà, et le reconnaissent presque comme un père, un grand-père, un oncle, ou du moins, un membre proche du paysage du quotidien. À coup sûr, une référence affective qui rassure face à l’infini d’une vie en devenir.
Immensité du gouffre de l’inconnu. Effrayant si l’on veut bien se donner la peine d’y penser. Et bien dans cet établissement, en lisière entre deux mondes de France, capitale et banlieue, - justement - on pense. Si le cartable est vide, l’essentiel, c’est qu’il y soit et c’est déjà un début. Des fournitures, "on en a, ne vous inquiétez pas". Le "on" commence à exister. On, cela veut dire l’homme, l’enfant comme l’ascendant, collectivement assimilés.
Claire Simon, la réalisatrice de ce documentaire, choisit de ne pas livrer le code de décryptage dans le "package" livré regard après regard, au fil des images et des séquences. Chacun devra faire l’effort. La solution de l’équation se trouve à la source. Laquelle ? Rien d’énigmatique mais rien à déflorer trop vite non plus. Au débouché du ruisseau, il sera aisé pour le spectateur de s’interroger, et de comprendre - pourquoi pas rétrospectivement - la valeur de cet enseignement : redimensionner les rapports de force entre le maître et l’élève. Même sans connaître l’illustre instituteur militant, Anton Makarenko, qui a donné son nom à notre édifice offert portes ouvertes, telle une fabrique sur le terrain de la pédagogie du primaire.
L’exercice et l’implication au travail révèle la fonction plus que le titre, et non l’inverse. Comme si la distribution des rôles suivait dès le début du parcours une conception de la hiérarchie en mode coopératif. C’est un système moral qui fait autorité. Il n’y a plus un fort et un faible, il y a des hommes égaux entre eux, quelque soit la géométrie des étiquettes. Et, tout simplement, parce qu’il n’y a plus d’étiquettes, et, puisqu’il n’y a plus d’étiquettes, il n’y a pas davantage de différences. Le pont, entre deux rives, a absorbé la rive opposée.
Pas étonnant si les paroles de Rihanna ont trouvé leur résonance dans le cœur éveillé des jeunes pousses tournées vers l’extérieur et l’autre : "Shine bright, like diamonds, we are beautiful in the sky".
Rien d’autre à dire. Seulement rejoindre la troupe !
Laurent Berger-Vachon
Jeune Cinéma en ligne directe
Apprendre. Réal, sc, ph : Claire Simon ; son : Elias Boughedir, Pierre Bompy, Nathalie Vidal, Jules Jasko ; mont : Luc Forveille (France, 2024, 105 mn). Documentaire.