par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe
Sélection officielle de la Quinzaine des Cinéastes au Festival de Cannes 2024.
Sortie le mercredi 19 mars 2025
Hernán Rosselli est aujourd’hui réalisateur et professeur à l’Université de cinéma de Buenos Aires. Il collabore à plusieurs revues de cinéma en tant que critique. Quelque chose de vieux, quelque chose de neuf, quelque chose d’emprunté a été présenté à la Quinzaine des cinéastes à Cannes en 2024. Cette expression, tirée des premiers vers d’une comptine traditionnelle anglaise, est censée porter bonheur à la mariée le jour de son mariage : il faut qu’elle pense à avoir sur elle à la fois un vêtement ancien, un neuf et un autre qu’on lui aura prêté afin que le mariage soit heureux.
Après, en 2014, Mauro, Prix Fipresci au Festival de Rotterdam, ce quatrième long métrage propose un mélange entre présent et passé en un savant dosage quasi labyrinthique entre images d’archives familiales et récit entre fiction et réalisme. En fait, après que Maribel, artiste plasticienne qu’il connaît depuis son adolescence, lui eut montré toutes ses archives familiales, Hernán Rosselli est fasciné par ce récit d’une famille qui s’est consacrée, de façon plus ou moins mafieuse, par l’intermédiaire du père, aux jeux de hasard clandestins.
"Ce n’étaient pas des films familiaux ’ordinaires’, déclare le réalisateur. Il y avait déjà une petite mise en scène qui pouvait faire surgir une histoire. C’était plutôt le regard d’un cinéaste amateur que celui d’un père de famille derrière sa caméra. Et ces images étaient le reflet de toute une époque, celui du retour de la démocratie. Ce matériau offrait la possibilité de faire un voyage dans le temps, avec des références historiques très concrètes".
Ainsi va naître ce film, qui travaille à la lisière du documentaire en jouant sur les divers visages de Maribel, mais aussi de sa mère, ce qui va permettre une mise en abyme kaléidoscopique pas toujours facile à suivre, mais fort intelligente et qui convoque des aspects oubliés de la situation politique et historique de l’Argentine d’alors et de maintenant. Le spectateur est plongé à la fois dans une histoire personnelle, filmée souvent de manière hâtive dans des clairs-obscurs qui illustrent bien la situation clandestine de ces paris et de ces transferts d’argent, mais aussi sur la situation familiale avec ses problèmes et ses drames.
Selon l’auteur, Hugo Felpeto, le vrai père et auteur des films d’archives, évoquait souvent les films des années 1980, très importants pour la classe ouvrière des faubourgs de Buenos Aires, comme Le Parrain, Les Affranchis ou le Scarface de Brian De Palma (1). Et c’est ainsi que le documentariste est parvenu à ce film hybride et passionnant, mêlant tour à tour fiction et archives, réinterprétant le puzzle à partir des deux cents heures de bobines et de cassettes qu’on lui avait confiées.
Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe
1. Le Parrain (The Godfather) de Francis Ford Coppola (1972) ; Les Affranchis (Goodfellas) de Martin Scorsese (1990) ; Scarface de Brian De Palma (1983)
Quelque chose de vieux, quelque chose de neuf, quelque chose d’emprunté (Algo viejo, algo nuevo, algo prestado). Réal, sc : Hernán Rosselli ; ph : Joaquin Neira & Hugo Felpeto ; mont : H.R., Federico Rotstein & Jimena Garcia Molt ; mu : Jean-Sébastien Bach ; déc : Micaela Lauro & Santino Mondini Rivas. Int : Maribel Felpeto, Hugo Felpeto, Alejandra Cánepa, Leandro Menendez, Juliana Inae Risso, Marcelo Barbosa, Javier Abril Rotger (Argentine, 2024, 100 mn).