par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe
Sélection du Festival du film francophone d’Angoulême 2024
Sortie le mercredi 2 avril 2025
Après cinq courts métrages et une série télévisée, Barbès Palace en 2016, Julien Menanteau nous livre un film bien fait et quasiment documentaire sur la vie des garçons d’écurie dans un haras. En fait, il s’agit de souvenirs d’enfance : gamin, il passait ses week-ends sur un hippodrome, entouré de gens pour qui l’équitation était une raison de vivre. Fils de cavalier, il avoue cependant qu’il était plus à l’aise à côté d’un cheval que dessus. Lads est ainsi pour lui un retour aux sources.
En effet, il ne propose pas ici une vision idyllique des centres équestres, qu’il présente plutôt comme un lieu de privation de liberté, entre caserne, colonie de vacances et même prison, où la rivalité entre les lads est patente, car le combat est rude et sans pitié pour devenir jockey, et pas simplement au niveau du poids et de la forme physique.
Selon Julien Menanteau, cet enfermement et ces mesures corporelles vont encore plus loin et dépassent même le domaine de l’hippisme. Elles font partie d’une certaine manière de considérer l’être humain, non comme un but ultime, mais comme un outil, au même titre que le cheval, qui, s’il est accidenté ou malade, sera abattu. D’où la belle scène du film qui fait que le jeune lad, Ethan, préférera mettre en péril sa carrière par compassion pour le jeune cheval rétif, Pepito, qu’il a aidé à naître.
Sous ses apparences de modernité et de simplicité héritées des séries, Lads est un film puissant qui intéressera même les spectateurs non concernés par ce sport, car il ne traite pas seulement du milieu des courses, du turf et des paris. On pourrait dire qu’il s’agit d’une sorte de métaphore sur le fonctionnement de nos sociétés sans cesse écartelées entre concurrence féroce et empathie pas seulement forcée. La précision de la description de ce milieu atypique est particulièrement bien menée et la photographie de Julien Ramirez Hernan, qui a notamment travaillé pour le film Le Sixième Enfant (1) ne laisse dans l’ombre aucun détail.
Sans oublier les chevaux, qui occupent évidemment la place centrale, "drivés" par Mario Luraschi, célèbre dresseur, par ailleurs père du jeune Marco qui interprète le rôle principal d’Ethan. Et on n’oubliera pas non plus les acteurs qui apportent une dimension réaliste non négligeable, à commencer par Jeanne Balibar qui semble avoir été directrice d’une écurie de courses toute sa vie, mais aussi Marc Barbé dans le rôle de l’entraîneur mutique et autoritaire qui cache un lourd secret. Et tous les acteurs secondaires font de ce premier long métrage une réussite, à savoir Phénix Brossard dans le rôle du lad jaloux, Léon Vital dans celui du père défaillant et Ethelle Lardued dans celui de Zoé, la bonne copine.
Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe
1. Le Sixième Enfant de Léopold Legrand (2022), nommé aux César 2023.
Lads. Réal : Julien Menanteau ; sc : J.M., Nour Ben Salem ; ph : Julien Ramirez Hernan ; mont : Manon Falise ; mu : Jack Bartman ; déc : Laure Satgé ; cost : Marta Rossi. Int : Marco Luraschi, Jeanne Balibar, Marc Barbé, Phénix Brossard, Léon Vital, Ethelle Lardued (France, 2024, 90 mn).