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Jeune Femme à l’aiguille (la) (2024)
de Magnus von Horn
publié le mercredi 9 avril 2025

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n°430, été 2024

Sélection officielle En compétition du Festival de Cannes 2024

Sortie le mercredi 9 avril 2025


 


Ce troisième long métrage du réalisateur suédois Magnus von Horn se situe au Danemark, après la Première Guerre mondiale. Une jeune et pauvre ouvrière, Karoline (Victoria Carmen Sonne), vit à Copenhague, et, son mari étant au front, entame une relation amoureuse avec son patron. Elle tombe enceinte. La mère, qui veille sur l’entreprise, oblige le fils à la quitter. Elle croise alors le chemin de Dagmar (Trine Dyrholm) qui dirige une entreprise d’adoptions clandestines.


 


 

Le film débute par de nombreux plans fixes sur des visages déformés qui annoncent la "couleur" d’une distorsion équivalente du sens du sujet historique et cinématographique. Dans les contrastes du noir & blanc, à travers une image très travaillée et une mise en scène assez époustouflante, se développe une expressivité presque maladive tant elle est exacerbée ; les visages sont réduits à des formes malléables et modulables vers l’atrocité.


 


 

Karoline retrouve son mari, gueule cassée revenue des tranchées, qui trouve un emploi dans un cirque ambulant où il dévoile sa figure reconstituée. Les agissements de Dagmar envers Karoline, la calmant de ses peurs par de l’éther à haute dose, et le mystère quant à la destination des bébés, intensifient peu à peu l’horreur de la situation. La monstruosité règne.


 


 

Cependant l’histoire est tirée de faits réels : après la guerre, dans le monde, des centaines de milliers d’enfants ont été retirés à leurs mères célibataires ; la monstruosité était bien là. Mais fallait-il pour autant affubler Karoline de tant de malédictions démonstratives au point d’être caricaturales ? Les deux actrices incarnent cependant de fortes personnalités, l’une dans l’austérité, l’autre dans la victimisation.


 


 

Dans ce drame à l’esthétique hyper réaliste, accentué d’effets fantastiques provoquant épouvante et angoisse, Magnus von Horn n’a pas osé s’engouffrer tout à fait dans le film d’horreur. En restant à la lisière, il donne un film hybride décrivant un monde de cruauté et de désespérance, qui prête au rejet ou au risible, tant parfois on ne sait plus ce que l’on est en train de voir.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n°430, été 2024


La Jeune Femme à l’aiguille (Pigen med nälen). Réal : Magnus von Horn ; sc : M.V.H. & Line Langebek Knudsen ; ph : Michal Dymek ; mont : Agnieszka Glińska ; mu : Frederikke Hoffmeier. Int : Vic Carmen Sonne, Trine Dyrholm, Besir Zeciri, Joachim Fjelstrup Tessa Hoder (Danemark, 2024, 115 mn).



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