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Cité muette, une mémoire occultée (la) (2014)
de Sabrina Van Tassel
publié le lundi 11 mai 2015

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 13 mai 2015

La Cité muette, haut lieu d’internement juif d’août 1941 à août 1944 est une cité HLM de la région parisienne.

Une cité qui ne dit pas son nom, qui ne reconnaît pas son passé, qui ne se reconnaît pas territoire de la souffrance et du sort de près de 80 000 Juifs, une cité qui abrite depuis la fin de la guerre des logements sociaux où cohabitent une population à la situation et aux revenus précaires et quelques malades mentaux venus de l’hôpital de Ville Evrard.

Cette cité que Sabrina Van Tassel découvre un jour de l’année 2006, au hasard d’un tournage (La Tribu de Rivka) la bouleverse par son étrange aspect "normal".
Elle décide alors de lui consacrer un film.

Cette cité se nomme le camp de Drancy.


 

D’un regard d’une dignité exemplaire et consciente de l’importance de sa tâche, Sabrina Van Tassel chemine dans toutes les directions possibles afin d’élucider, de dénoncer, de responsabiliser les différents acteurs d’un tel crime.

En premier lieu l’information peu révélée jusqu’alors et qu’elle a le mérite de remettre à jour : la responsabilité de la police française dans la déportation des Juifs.


 

D’anciens détenus témoignent, leur parole est au-delà de l’émotion ; certains diront qu’ils n’ont jamais vu les nazis, mais des Français en qui ils avaient confiance.
D’autres décriront la faim, l’humiliation, la déchéance, d’autres encore essaieront d’évoquer les traces de misérables souvenirs heureux.

Mais Sabrina Van Tassel fouille, toujours plus loin, pour comprendre, confondre les partis, impliquer les personnes et recueillir des avancées dans la pensée de l’innommable.
Serge Klarsfeld, lui-même, qui mit en œuvre le projet du mémorial de la Shoah à Drancy, rend compte du malheur des enfants déportés.
La cinéaste interroge tour à tour le maire de Drancy, une habitante de la cité, un psychiatre, un pharmacien dont le projet est de créer un musée de la mémoire, afin d’élucider le fait que des gens puissent vivre là où d’autres ont souffert et perdu leur vie.

Entre les images tournées en couleur à la rencontre des personnes, elle intercale des images d’archives, en noir & blanc éprouvantes, accablantes, difficiles.


 

Car rien n’a changé ou presque dans la cité : demeurent les mêmes fenêtres étroites, les mêmes escaliers usés, les mêmes couloirs sinistres, les mêmes arcades sombres. D’autres destins se superposent aux destins des Juifs en ce lieu funeste et macabre.

Par la rigueur de son écriture, la radicalité de son intention, l’honnêteté et la réserve de son regard, Sabrina Van Tassel parvient à transmettre un sentiment si fort qu’une extrême responsabilité nous saisit.


 

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma en ligne directe (mai 2015)

La Cité muette, une mémoire occultée. Réal : Sabrina Van Tassel ; mont : Yann Leonarduzzi ; mu : Olivier Adelen (France, 2014, 78 mn). Documentaire

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