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Bestiole (la) (1963)
de Claude Autant-Lara
publié le dimanche 29 janvier 2017

Avis de recherche : La Bestiole

par Alain Virmaux
Jeune Cinéma n°329-330, printemps 2010


 


Point de départ : la filmographie de Pauline Carton dans le livre de Yves Uro (1) fait état de cette mystérieuse Bestiole.

Par recoupements avec les ouvrages de Raymond Chirat et de Yvan Foucart, on parvient à mettre sur pied les données de l’affaire, ainsi résumable : tournage, en 1963, d’une coproduction franco-italo-espagnole sous le titre Humour noir. (2)

La mode était alors aux films à sketches. Celui-là aurait fait l’objet de présentations privées, mais semble bien n’avoir jamais été exploité commercialement, pour des raisons obscures. (3)
À l’origine, la visée était clairement de produire un film de prestige, signé de trois grands noms : Claude Autant-Lara pour la France et - selon Freddy Buache - Juan Antonio Bardem pour l’Espagne et Vittorio De Sica pour l’Italie.

Mais De Sica se retira du projet pour raisons de santé, puis Bardem dut renoncer à son tour.
On tenta alors de les remplacer par de moindres signatures. L’ensemble fut bouclé vaille que vaille, et une ou plusieurs projections de presse organisées. Apparemment, le résultat ne parut pas concluant, et l’affaire en resta là.
Autant-Lara, qui avait tourné son sketch "en premier" et en était plutôt satisfait, a rapporté, en 1972, qu’il avait offert de le racheter à la société productrice (Lux), en vue de l’étoffer pour en faire un long métrage. Sa proposition ne reçut aucune suite et il n’entendit plus parler de rien, ce qui lui laissa quelque amertume.

Les bobines de cette Bestiole ont-elles survécu ?

Elles mériteraient la curiosité des historiens et des simples amateurs. Car le générique était alléchant. Autant-Lara et Jean Aurenche s’étaient inspirés de deux contes de Maupassant pour en tirer une farce paysanne à la fois sombre et truculente. La distribution réunie était assez impressionnante : Pierre Brasseur, Sylvie, Paulette Dubost, Robert Arnoux et, donc, Pauline Carton. Sans oublier Max Douy pour le décor et René Cleorec pour la musique.

On n’ira pas jusqu’à rêver d’un chef-d’œuvre englouti. Le Autant-Lara des années 60 n’était déjà plus tout à fait celui de La Traversée de Paris (1956). Il avait obliqué vers une veine gaillarde - La Jument verte (1959), Le Magot de Josefa (1963) - dont la lourdeur déçut même ses admirateurs.

Pourtant, dans ses films les plus ouvertement commerciaux, émergeaient des séquences où l’on retrouvait sa patte et celle de ses scénaristes. Rien n’interdit de penser qu’il en allait de même pour cette Bestiole évanouie.
Souhaitons que des chercheurs opiniâtres retrouvent la trace de ce sketch (probablement d’une trentaine de minutes, une sorte de court métrage), si du moins la pellicule a pu échapper à la désintégration.

Dernier point. Remercions au passage l’Institut Lumière qui, par le truchement amical de Raymond Chirat, nous a fait parvenir un petit dossier sur Humour noir : un jeu de quatre affiches, présentant tour à tour l’ensemble et chacun des trois sketches ; puis une lettre manuscrite (2 feuillets) de Claude Autant-Lara, où il évoque - en 1972 - sa part dans l’entreprise et sa déception ; enfin une fiche émanant d’une centrale mal identifiée (C.C.R.T.) et attestant que le film fit l’objet d’une (au moins) présentation de presse ; fiche qui comporte, pour finir, l’appréciation globale que voici : "Cet humour macabre est parfois d’un goût douteux. Ensemble pour adultes" (sic).
Petite colle à l’intention des lecteurs de Jeune Cinéma : quid de la "C.C.R.T." ?

Alain Virmaux
Jeune Cinéma n°329-330, printemps 2010

1. Yves Uro, Pauline Carton. Itinéraire d’une actrice éclectique, Éd. L’Harmattan (2009).

2. La Bestiole est un sketch du film collectif Humour noir  : Miss Wilma (La Mandrilla) de José María Forqué ; La Corneille (La Cornacchia) de Giancarlo Zagni ; La Bestiole de Claude Autant-Lara (1963).

3. Selon IMDB, Humour noir serait sorti en Espagne le 12 avril 1965 et, en Italie, le 19 juin 1965 au festival de Alghero, Sardaigne.

La Bestiole. Réal : Claude Autant-Lara ; sc : Jean Aurenche & Pierre Bost, d’après deux nouvelles de Guy de Maupassant ; ph : Gilbert Chain ; mu : René Cloërec , mont : Madeleine Gug. Int : Sylvie, Pierre Brasseur, Jean Richard, Pauline Carton, Paulette Dubost, Robert Arnoux, Jacques Marin, Jean Martinelli, Pierre Repp.

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