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Paris pieds nus (2015)
de Dominique Abel & Fiona Gordon
publié le mardi 7 mars 2017

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 378-379, février 2017

Sortie le mercredi 8 mars 2017


 


Le Belge Dominique Abel et la Canadienne Fiona Gordon forment au cinéma un couple désopilant et infernal qui joue, écrit et filme des aventures les plus féeriques et improbables. Venus du monde du théâtre, ils fondent, en 1980, leur compagnie "Courage mon amour". Leurs sujets de prédilection sont l’étude des êtres les plus malhabiles et gauches de la société. Ils débutent en 1992 dans La Poupée, un court métrage de Bruno Romy, devenu depuis le troisième larron de la Compagnie.

Le premier long métrage, L’Iceberg (2005) (1), aligne avec une fantaisie, un imaginaire et une technique remarquables, une série de gags hilarants dans la veine de Pierre Étaix, plus débridée encore. Leur comique burlesque dépasse et prolonge le dialogue incongru, désordonné, enfantin, par des effets de corps totalement dépourvu de contraintes, d’une souplesse élastique et flexible à souhait. Leurs corps compressibles et extensibles se lovent et se fondent dans les espaces les plus impossibles, par exemple ici dans Paris, où ils fabriquent figures et postures dans un équilibre instable sur les poutrelles de la tour Eiffel.


 

Une obsession les suit et les poursuit de films en films et encore, dans ce dernier, la mise en avant d’un lien, câble électrique ou fil de laine, capable de les relier indéfiniment l’un à l’autre, en les attachant, les ligotant ou à l’inverse en les déliant et les éloignant, reliés malgré tout et encore et toujours l’un à l’autre. Un comique d’expression, qui passe par un plaisir à jouer, une délivrance, une liberté. Celle magnifiquement lisible du jeu de Emmanuelle Riva, pleinement heureuse de ce rôle désinvolte et indépendant où elle peut, aux côtés de Pierre Richard, savourer ce temps béni.


 

Il règne dans le cinéma de Abel & Gordon, et dans ce film en particulier, un regard sur la société, à la fois très critique et complice, cherchant toujours à atteindre l’effet comique en singeant les faiblesses et les lacunes de celle-ci. Comme il serait plus simple de vivre comme eux en plein Paris, de danser au milieu de nulle part, de marcher pieds nus, de disparaître et d’arpenter la Tour Eiffel.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 378-379, février 2017

1. "L’Iceberg", Jeune Cinéma n°302, mai 2006.


Paris pieds nus. Réal, sc : Dominique Abel & Fiona Gordon ; ph : Claire Childéric & Jean-Christophe Leforestier ; mont : Sandrine Deegen. Int : Abel & Gordon, Emmanuelle Riva, Pierre Richard, Frédéric Mertz, David Palatino (France-Belgique, 2015, 83 mn).



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