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Barbara (2017)
de Mathieu Amalric
publié le mercredi 6 septembre 2017

Sélection officielle Un certain regard Festival de Cannes 2017

Sortie le mercredi 6 septembre 2017

par Anne Vignaux-Laurent
Jeune Cinéma n°381, été 2017


Pitch : On tourne un film sur la chanteuse Barbara. L’actrice, le réalisateur, l’équipe, tout le monde travaille. Ça se passe à Paris et à Percy-sur-Marne en passant par Châteauroux.


 

Barbara a reçu le prix inédit "de la poésie du cinéma".
Si le concept de "poésie" demeure flou, il y a bien longtemps qu’il a bondi hors du pré-carré du genre littéraire, que les couches du lyrisme romantique et des collages surréalistes l’ont recouvert d’états psychiques, et que les afflux d’images ont brisé ses frontières, le transformant en terrain vague d’aventures.

Du coup, on voit Barbara, le film, comme surplombant toutes les mêlées. Et on s’autorise une remarque para-people de midinette. Dès le début du film, cette reconstitution d’un couple remarquable, Jeanne Balibar et Mathieu Amalric, aux visages atypiques, aux styles marginaux, aux émotions singulières, apparaît comme une preuve de la réversibilité possible du temps.
Ça vous tire des larmes inattendues. (1)


 


 

Donc Yves Zand (2) et son actrice sont en quête de la dame brune, ses mots, ses musiques, sa folie. Chacun dans son rôle, lui regarde et façonne comme il peut, elle est regardée et se doit de "devenir", et nous, nous voyons se dérouler ce travail du vivant, dangereux et cruel, qui ne ressemble à aucun autre.


 

Les vertiges et les mises en abyme du créateur et de ses créatures, les tergiversations de la création, on connaît bien, cinéma et théâtre se sont employés à nous déniaiser sur le sujet.


 

Mais jamais la circulation entre réel et imaginaire, entre fantasme et conscience, entre lieux avec soupçons d’ubiquité, entre corps "monades", et, surtout, entre acteurs et personnages n’a été plus libre que dans Barbara.

Balibar toujours au bord de la transe, Amalric, amoureux ou pas, toujours un peu transi, et l’extrême sophistication de ce scénario-là avec ses multiples traversées de miroir, ça nous balade dans un labyrinthe qu’il sera nécessaire d’explorer à nouveau.


 

Car, dans ce fim, il s’agit de s’égarer.
Et ce n’est pas parce que les frontières ont disparu qu’il n’y a plus de contrebande.

Anne Vignaux-Laurent
Jeune Cinéma n°381, été 2017

1. Amalric dit que si Balibar avait ressemblé à Monroe, il aurait peut-être fait un film sur Marilyn.

2. Dans Tournée (2010), le regardeur s’appelait Joachim Zand. Il y a des cas où Amalric doit endosser le féminin de sa mère.

Barbara. Réal : Mathieu Amalric ; sc : M.A. & Philippe di Folco ; ph : Christophe Beaucarne ; son : Olivier Mauvezin ; déc : Laurent Baude ; cost : Pascaline Chavanne ; mont : François Gédigier. Int : Jeanne Balibar, Mathieu Amalric, Lisa Ray-Jacobs, Vincent Peirani, Aurore Clément, Fanny Imber, Grégoire Colin (France, 2017, 97 mn).

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