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À plein temps (2021)
de Éric Gravel
publié le mercredi 16 mars 2022

par Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle Orizzonti de la Mostra de Venise 2021.
Prix de la meilleure réalisation et Prix de la meilleure actrice.

Sortie le mercredi 16 mars 2022


 


Avant, Julie était cadre, en col blanc, elle était mariée, elle tenait à sa petite maison rurale de banlieue, elle ne voulait pas que ses enfants grandissent dans une cité. Maintenant que le père est aux abonnés absents, elle est cheffe de file d’une équipe de ménage d’un grand hôtel parisien très exigeant à Saint Lazare. Et c’est loin.


 

Pour assurer, elle doit intégrer les consignes et les cadences d’un métier où tout est minuté, et les concilier avec la vie à la maison et les enfants. L’équilibre de son service dépend de la ponctualité, de la régularité, de la serviabilité, et ça ne marche que si tout marche : les enfants à l’école, le RER à l’heure, la nounou souple. Le moindre embouteillages, le plus petit retard peuvent gripper la machine. Alors, évidemment, s’il y a, en plus, une grève dans les transports… Elle fonce, surmenée, survoltée, elle pare au plus pressé, affrontant tant bien que mal chaque situation, chaque décor, chaque altercation, chaque chance, chaque dilemme. Au point de ne plus voir les impasses dans lesquelles, elle s’engage.


 

Le film et la comédienne principale, Laure Calamy, sont parfaitement assortis : pas d’insinuations, du direct. Aucun pathos, un réalisme pur et dur qui résonne familièrement à qui a dû compter sur le RER pour se rendre à son travail et jongler quotidiennement avec les innombrables contraintes.
Mais aucune empathie non plus pour les autres de la part de Julie. Elle comprend les grévistes mais n’envisage pas d’action syndicale à l’hôtel, elle n’entend pas non plus les réticences de la nounou saturée, et ne se sent pas concernée par la rupture de période d’essai de la jeune femme qu’elle a pourtant poussée à la faute.

On pense à Elle court, elle court la banlieue de Gérard Pirès (1973). À l’époque, c’était juste l’éloignement qui rendait difficile une histoire d’amour. Cinquante ans plus tard, c’est pire : tout va plus vite, tout est menaçant, les places sont plus chères, la perte de contrôle guette à tout moment, c’est devenu une question de survie.


 

La musique électro techno de Hélène Drésel achève de donner à ce récit une de ces ambiances d’urgence matérielle, qui n’ont pas vocation à inspirer de l’émotion, mais illustrent bien ce monde ultra contraint.

C’est le deuxième long métrage de Éric Gravel, après Crash Test Aglaé. (1).

Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Crash Test Aglaé de Éric Gravel (2017).


À plein temps. Réal, sc : Éric Gravel ; ph : Victor Seguin ; mont : Mathilde Van de Moortel ; cost : Caroline Spieth ; mu : Irène Drésel ; cost : Caroline Spieth. Int : Laure Calamy, Anne Suarez, Geneviève Mnich, Nolan Arizmendi, Sasha Lemaitre Cremaschi, Cyril Gueï, Lucie Gallo, Karine Valmer (France, 2021, 87 mn)



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