home > Films > Disco Boy (2022)
Disco Boy (2022)
de Giacomo Abbruzzese
publié le mercredi 3 mai 2023

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle en compétition de la Berlinale 2023.
Ours d’Argent de meilleure contribution artistique pour Franz Rogowski

Sortie le mercredi 3 mai 2023


 


Ce film, bien parti pour obtenir l’Ours d’Or à Berlin cette année, nous dit-on, n’est pas bien-pensant pour une fois, en tout cas pas manichéen. Pourtant, il pose maintes questions dont certaines resteront sans réponse contrairement à tous ceux qui, de nos jours, ont réponse à tout sur les migrants, les conflits, l’Ukraine et la Biélorussie, le néocolonialisme, l’écologie, etc. Bien sûr le réalisateur se pose la question de la violence qui mène le monde actuel, violence à tous les niveaux et même dans la musique, mais il n’a pas de solution clé en main. Il semble aussi désemparé que nous en nous livrant cette fable fiévreuse et envoûtée.


 


 

Giacomo Abruzzese, originaire des Pouilles en Italie, n’a à ce jour réalisé que des courts métrages et un documentaire, en 2020, America. Son premier long métrage, produit par la France par le biais des Films Grand-Huit, constitue un ensemble déroutant qui use (et abuse ?) de l’ellipse, de la lumière bleue, des fumigènes et de la sueur, toujours très proches des larmes et du sang. C’est un concentré de violence, sublimé par une mise en scène à l’évidence tout sauf didactique, la photographie magnifique de Hélène Louvart, la musique de Vitalic, pape électro, et des acteurs vraiment charismatiques, comme l’artiste afro-punk, Laetitia Ky dont les yeux (faussement) vairons vont déteindre sur tout le film, ainsi que Morr Ndiaye, dans le rôle d’un chef rebelle du delta du Niger.


 


 

Et bien sûr, l’éblouissant acteur allemand, Franz Rogowski, qui irradie tout le film de sa présence à la fois discrète et prégnante. Né en 1986, il est aussi danseur et chorégraphe et a déjà 26 films à son actif (avec un beau palmarès). S’il tourne depuis 2011, on l’avait remarqué à partir de 2018 (1). C’est en partie pour cela que Giacomo Abbruzzese l’a choisi puisque son personnage, un peu caméléon, va traverser plusieurs vies pour s’incarner dans celle d’un "disco boy" justement.


 

Le film commence mystérieusement par un plan sur des corps africains entassés dans une case de la jungle, puis par un gros plan sur les yeux vairons d’une femme et, tout de suite après, sur une équipe de foot braillarde qui se rend de Biélorussie en Pologne pour un match. Deux personnages, Aleksei et son ami Mikhael, vont en profiter pour se faire la malle, mais hélas leur rêve de Paris va tomber à l’eau justement lorsque Mikhael se noie en passant un fleuve frontalier. Aleksei se retrouve à Paris, sans papier, et s’engage dans la Légion étrangère qui lui redonne un statut.


 


 


 

C’est à ce moment-là, lors d’un passage dans une discothèque parisienne, que sa vie (et le film aussi) basculent. On entre directement dans l’imaginaire du réalisateur qui nous conduit alors dans une sorte de réalisme magique, puisque la danseuse, qu’on avait aperçue au début du film, le conduit au guerrier Jomo qui se bat contre l’installation d’une immense raffinerie de pétrole dans le delta du Niger.


 


 


 

Le spectateur sera sans doute perdu, mais qu’il se laisse aller à cet envoûtement qui fait parfois penser à du vaudou. "J’avais envie de tourner ce film d’une manière abstraite". Et cette abstraction, c’est la danse qui la communiquera.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Une valse dans les allées, de Thomas Stuber (2018), Jeune Cinéma en ligne directe ; J’étais à la maison, mais..., de Angela Schanelec (2019), Jeune Cinéma en ligne directe ; Une vie cachée de Terrence Malick (2019), Jeune Cinéma n°395, été 2019 ; Ondine de Christian Petzold (2020), Jeune Cinéma en ligne directe.


Disco Boy. Réal, sc : Giacomo Abbruzzese ; ph : Hélène Louvart ; mont : G.A., Ariane Boukerche & Fabrizio Federico ; mu : Vitalic & Maxence Dussère ; déc : Esther Mysius ; cost : Marina Monge ; chorégraphie : Qudus Onikeku. Int : Franz Rogowski, Morr Ndiaye, Laëtitia Ky, Leon Lučev, Matteo Olivetti, Robert Więckiewicz, Michał Balicki (France, 2022, 91 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts