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Risi, Dino (1916-2008)
Une vie, une œuvre
publié le mercredi 15 juillet 2015

par Gérard Camy
Jeune Cinéma n°317, été 2008


 


Né le 23 décembre 1916, Dino Risi fait ses débuts comme assistant de Mario Soldati (1906-1999) (1) et de Alberto Lattuada (1914-2005.

Dans les années 1950, il réalise ses premiers films, et met en scène Pain, amour, ainsi soit-il en 1955. Ce film lui permet de trouver un style qui éclate dans une autre série, nouvelle étape dans l’évolution du genre. Pauvres mais beaux (156), Beaux mais pauvres (1957) et Pauvres Millionnaires (1958) décrivent des jeunes gens qui essaient de vivre dans une société en mutation rapide, où ils ont beaucoup de peine à s’insérer. Mélange de drôlerie et de mélancolie, scénarios d’une précision remarquable sont les caractéristiques de cet ensemble qui préfigure la "Risi Touch".


 

Avec Une vie difficile (1961) et La Marche sur Rome (1962) la comédie de mœurs prend définitivement une dimension politique. Elle intègre avec force les composantes historiques de l’Italie mais n’oublie pas l’analyse contemporaine, celle du "miracle économique" des années 60.


 

Deux films de Dino Risi en font remarquablement la synthèse : Le Fanfaron (1962) et Les Monstres (1963). Le premier pose un regard d’une profonde amertume sur cette Italie du "boom". Le second est un film à sketches dont la mosaïque de situations propose un tableau inquiétant de la société italienne. Football, misogynie, égoïsme, amoralité, tout est passé au crible de l’esprit féroce de Dino Risi, servi par deux acteurs déchaînés, Ugo Tognazzi et Vittorio Gassman.


 

Fais-moi très mal et couvre moi de baisers (1968) (2) et Une poule, un train… et quelques monstres (1969), sont aussi deux œuvres importantes où satire, parodie, analyse de la société se mêlent étroitement. Chez Dino Risi, le spectacle trouve souvent son inspiration dans la difformité, car "la normalité n’est pas spectaculaire". Toutefois, ni totalement monstrueux, ni véritablement anormaux, ses héros dérisoires ne font que mener leurs obsessions jusqu’au terme naturel de leur folie.


 

Dans les années 70 le cinéaste aborde tous les sujets, bravant les interdits dans des films d’une férocité triviale et d’un scepticisme grandissant. Le célibat des prêtres dans La Femme du prêtre (1970), la condition féminine dans Moi, une femme (1971), la justice dans Le Petit Juge (1972), le terrorisme dans Rapt à l’italienne (1973), la vieillesse suicidaire dans Parfum de femme (1974), le régime fasciste dans La Carrière d’une femme de chambre (1975), le drame de la retraite dans Dernier amour (1978), ou encore l’incompréhension entre générations dans Cher papa (1979), autant de thèmes dans une œuvre profondément iconoclaste et libératrice, à la fois chronique et dénonciation des dérives d’une société. Le surprenant et inattendu Fou de guerre en 1985 avec Coluche, en sera une ultime illustration.


 

Ce "Billy Wilder made en Italy" est mort le 7 juin 2008. Il avait reçu en 2002 un Lion d’or au festival de Venise pour l’ensemble de son œuvre.

Gérard Camy
Jeune Cinéma n°317, été 2008

1. Cf. "Mario Soldati vu d’ici", Jeune Cinéma n°410-411, septembre 2001

2. Fais-moi très mal et couvre moi de baisers de Dino Risi (), "film de chevet". Cf. Jeune Cinéma n°69, mars 1973 et Jeune Cinéma n°361-362, automne 2014.



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